Natasha Krenbol, Traverse
Entre arts premiers et Beckett
Natasha Krenbol s’attache dans son oeuvre picturale aux non graciés et aux vaincus. Mais sans ajouter à ses images le moindre lyrisme superflu.
L’oeuvre se rattache aux arts premiers et n’est pas sans rappeler sur un plan pictural l’approche d’un Beckett.
Comme lui, elle a de l’affection pour les damnés et nous fait entrer dans des cercles de l’enfer terrestre. Née à Zurich et installée dans la Drôme, son vitalisme la rapproche d’une Afrique première qui rappelle à la fois la beauté et l’indifférence splendide du monde.
S’il ne fait rien pour les hommes, il ne fait rien contre eux. Ce qui n’est pas le cas des seconds.
L’oeuvre reste puissante en ces formes premières lacérées de graffitis, là où même d’étranges ramasseurs de mégots cultivent encore des rêves en retour de leurs revers . C’est pourquoi parfois des danseuses s’ébrouent sur un afro blues et des chansons plastiques où se croisent quelques paroles dans la chauve rhétorique où se ressasse l’improbable histoire de l’humanité.
Il se peut que des vaincus se retrouvent au bras d’une mariée. Mais un seul soir.
Car il ne faut pas trop rêver.
jean-paul gavard-perret
Natasha Krenbol, Traverse, éditions Université Jean Moulin, Lyon 3, 2018, 118 p.