José-Luis Munuera, L’homme qui pouvait accomplir des miracles

José-Luis Munuera, L’homme qui pouvait accomplir des miracles

Depuis 2022, José-Luis Munuera s’est lancé dans une suite d’adaptations de grands auteurs. Après Herman Melville et Bartleby le scribe, Charles Dickens et Un Chant de Noël… il s’attache à H. G. Wells, l’illustre romancier, qui a commis, par exemple, La Machine à explorer le temps, L’Homme invisible, La Guerre des mondes… Munuera a retenu une nouvelle parue en 1898 dans le magazine The Illustrated London News, The man Who Could Work Miracles.

George McWhirter Fotheringay, un homme ordinaire, de nature septique, bavarde avec des amis dans un pub d’Immering. Ils parlent de miracles, de leur impossibilité ou de la probabilité que ceux-ci puissent exister. George tente une expérience et donne l’ordre à la lampe à pétrole pendue au plafond de se renverser et de continuer à brûler. A la stupéfaction de tous, la lampe s’exécute, entraînant un début d’incendie.
En rentrant chez sa logeuse, George s’essaie à différentes tentatives qui toutes se réalisent. Il s’interroge sur sa nouvelle capacité et aux possibilités qui s’offrent à lui. Un incident l’inquiète quand il envoie aux enfers l’agent Winch qui veut le mettre en prison suite à un miracle frappant. Il décide de consulter et une annonce dans le journal lui fait choisir une médium. Elle va déclencher, à son insu, une suite de situations de plus en plus considérables jusqu’à ce moment où…

L’album débute avec une mise en garde bien inquiétante. En effet, le narrateur avertit la lectrice, ou le lecteur, qui ferait preuve de scepticisme, objectant que certains détails sont improbables, qu’elle, ou il, sera mort de manière violente à la page 61 du récit.
Le héros, d’une nature rationnelle, va se trouver entraîné dans une escalade n’ayant plus conscience de dépasser des limites. L’auteur passe en revue, de façon très ironique, la manière d’opérer de quelques catégories professionnelles comme les médiums, les médecins, les psychiatres et les prêtres. Et H. G. Wells, avant José-Luis Munuera, a dressé des portraits sans concessions, s’attachant particulièrement au curé, le seul des quatre à figurer dans le texte original, et à ses ambitions que George peut l’aider à réaliser.
L’adaptation paraît des plus réussies dans la mesure ou Munuera donne un récit d’une belle cohérence, où le comique le dispute au tragique.

La mise en images est fabuleuse. Le dessinateur, pour recréer l’ambiance, le cadre le plus juste possible, s’est inspiré pour ses décors des tableaux d’Amédée Forestier, un peintre franco-britannique. La mise en pages et les cadrages sont judicieux et insufflent ce qu’il faut de rythme et de tension au récit.
La mise en couleurs, sombre à souhait, est le résultat d’un travail d’une grande qualité de Sedyas.
Une introduction signée de Véronique Béghain donne des indications précieuses sur le romancier. L’ébauche non retenue du dernier chapitre d’Orthodoxie, de G.K. Chesterton intitulé Le retour de Don Quichotte et le problème de la réalité, écrite en 1907, complète, par son ton et les propos satiriques abordés dans l’adaptation, d’une belle manière.

À quoi arrive-t-on ? Les créateurs sont obligés de spécifier qu’ils n’ont pas fait appel à des Intelligences Artificielles Génératives !!!! Et une adaptation de plus, un nouvel album des plus réussis par un auteur à l’exceptionnel talent.

serge perraud

José-Luis Munuera, L’homme qui pouvait accomplir des miracles, Dargaud, septembre 2025, 72 p. – 17,95 €.

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