Glenn Baxter, Shadoks ! (exposition)

Glenn Baxter, Shadoks ! (exposition)

Les utopies activistes

Glenn Bexter aime dessiner afin de raconter, cuisiner, lire, faire dérailler le monde à sa propre main. Il adore la cigale de La Fontaine et trouve injuste qu’elle soit fatalement punie pour avoir chanté et dansé tout l’été. C’est pourquoi, sous couvert de réalité, il fait muter le réel avec un instinct de survie utopique et de fable ironique. Le dessin devient l’acte de commenter librement le monde, de réduire les grandes choses en petites.
Baxter cultive les réponses adolescentes au réel dit sérieux. Footballeurs, convoyeur de fond, rois présumés du monde ou chauffeurs de taxi deviennent les bâtards qui permettent au dessinateur de traiter ses obsessions avec détachement. Il souligne par la bande (dessinée…) certains complexes de supériorité des héros dérisoires intrusifs qui pulsent notre imaginaire pour le réduire à un degré primaire.

Le créateur garde la liberté de briser et de mélanger de façon brutale les sources textes, images, sujets d’actualité. Au départ, il n’osait pas imaginer que l’on pouvait appeler ça de l’art. Il le faisait dans son coin, pendant que d’autres excellaient dans le type conceptuel, avec de belles références littéraires ou philosophiques. Il avait déjà choisi une autre voie. Elle permet de réviser les formes d’esthétique. Son univers est fascinant, poétique, drôle et intelligent. Une libération fait son chemin loin du cliché de la séduction, de la grâce incontournable.
L’auteur matérialise un univers baroque, classique et enfantin. S’y fait retour aux bandes dessinées primitives. Et l’artiste devient pour le dessin ce que Philippe Katherine est à la musique et Raymond Federman ou Queneau à la littérature. Baxter cultive sa liberté de penser et de créer, il dévoile la médiocrité et les moyens de s’en protéger afin de préserver une forme de dignité par un humour nonsensique critique. Il y a là une ouverture extrême et une confiance naïve. Mais surtout, la fausse « surdité » aux sirènes du réel pour dérouter le regardeur entre l’intimité et le publique, la révélation et l’explication.

jean-paul gavard-perret

Glenn Baxter, Shadoks !,  Jusqu’au 6 novembre 2016, MIAM, Sète.

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