De la nouveauté comme routine (et vice versa) : entretien avec l’artiste Frédéric Fleury

De la nouveauté comme routine (et vice versa) : entretien avec l’artiste Frédéric Fleury

L’œuvre de Frédéric Fleury est à l’image de son interview. Intelligente, impertinente et drôle mais au second degré. Il ne s’agit plus de mettre sur la rétine du postiche ou du fantasme dans le mental et la surface n’est plus l’infirmière impeccable des identités. Elle se distend comme une peau usée  là où l’imaginaire ne cesse de la tarauder. Tout se met à flotter, à fluctuer en diverses dérives qui ouvrent des seuils. L’image par ses effets de franges et de torsions les franchit.

De l’artiste : Coffret Frédéric Fleury,  Littétature Mineure, Rouen, 2017 – 25,00 €.

 Entretien :

Qu’est-ce qui vous fait lever le matin ?
Le devoir.

Que sont devenus vos rêves d’enfant ?
J’ai appris à relativiser.

A quoi avez-vous renoncé ?
A la sécurité de l’emploi.

D’où venez-vous ?
De Cherbourg.

Qu’avez-vous reçu en « héritage » ?
La calvitie.

Qu’avez vous dû « plaquer » pour votre travail ?
Mes rêves de gloire.

Un petit plaisir – quotidien ou non ?
Le thé.

Qu’est-ce qui vous distingue des autres artistes ?
La couperose.

Comment définiriez-vous votre approche du corps dans votre travail ?
Je cherche à dessiner les corps les plus absurdes possible.

Quelle fut l’image première qui esthétiquement vous interpella ?
L’affiche de Terminator.

Et votre première lecture ?
Je ne m’en souviens pas, sûrement quelque chose qu’on m’a forcé à lire à l’école (ah si peut être, « Sauve qui peut » de Sempé en Folio)

Quelles musiques écoutez-vous ?
Principalement du rock, du rap et des choses un peu plus expérimentales. J’aime bien certains disques folk aussi. J’écoute ce qui sort, j’aime bien découvrir des choses, je regarde tous les jours les nouveautés, comme une routine.

Quel est le livre que vous aimez relire ?
« La position du tireur couché » de J.P. Manchette

Quel film vous fait pleurer ?
« Rambo, the first blood ».

Quand vous vous regardez dans un miroir qui voyez-vous ?
Moi.

A qui n’avez-vous jamais osé écrire ?
A Samantha Fox.

Quel(le) ville ou lieu a pour vous valeur de mythe ?
« Twin Peaks ».

Quels sont les écrivains et artistes dont vous vous sentez le plus proche ?
La liste est longue, j’ai lu quelques livres de Caryl Férey dernièrement et j’adore la richesse du travail de Tal R.
« Bad Brain » d’Aaron Curry est un excellent catalogue d’exposition que je parcours souvent et je ris pas mal en regardant les oeuvres de Beni Bischof. J’aime bien ses assemblages de choses improbables et ses pièces absurdes.
J’aime beaucoup certains dessinateurs, comme Matt Brinkman ou Matt Lock par ex., des choses plus classiques comme Steinberg, Stieg, Sempé. Je suis admiratif du travail narratif que fait Yuichi Yokoyama. Après, je me sens proche de la démarche de quelqu’un comme Dennis Tyfus dans le sens ou quand je regarde ses livres ça me donne envie de travailler. Depuis peu, j’apprécie beaucoup les peintures et dessins d’Antwan Horfee aussi.
D’un point de vue purement graphique, j’imagine que je suis proche de Mehdi Hercberg (« Shoboshobo ») et pour tout ce qui est lié à la bande dessinée d’Anouk Ricard, de Roope Eronen et de Johnny Ryan.
Sans doute un peu de Ken Kagami aussi pour l’esprit irrévérencieux.

Qu’aimeriez-vous recevoir pour votre anniversaire ?
Un déguisement de personnage assis sur un dinosaure.

Que défendez-vous ?
Ma vertu.

Que vous inspire la phrase de Lacan : « L’Amour c’est donner quelque chose qu’on n’a pas à quelqu’un qui n’en veut pas »?
Je suis comme lui, toujours prêt à donner plein de choses que je n’ai pas.

Que pensez-vous de celle de W. Allen : « La réponse est oui mais quelle était la question ? »
C’est marrant mais pas trop non plus.

Quelle question ai-je oublié de vous poser ?
Combien je suis habituellement payé pour une interview de ce type.

Présentation et entretien réalisés par jean-paul gavard-perret pour lelitteraire.com, le 19 février 2017.

 

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