Daniele Buetti, Maybe You Can Be One of Us

Daniele Buetti, Maybe You Can Be One of Us

Daniele Buetti : l’image et le désir

Daniele Buetti rappelle combien les marques à la mode sont devenues notre peau. Nous les affichons comme autant de signes de reconnaissance. Mais par extension l’artiste considère les icônes païennes contemporaines comme des substitutions à la religion Les icones des Saints ont été remplacées par les top-models. Elles trônent en objet de dévotion sur les présentoirs de kiosques à journaux. Il y a donc fusion et confusion entre beauté, sacralité et commerce. Ce dernier fait croire que la sophistication du luxe sauverait le monde…
Dans une même image, Daniele Buetti fait passer de l’ombre à la lumière. Du cœur de l’obscur surgissent divers messages sous forme de larmes étincelantes un rien kitsch et des messages étranges. L’artiste incise le corps à coup d’arabesques et de signes griffonnés sur des photographies de top-models tirés les journaux de mode hauts de gamme. Ces opérations semblent le fruit de gestes automatiques, sortis de l’inconscient. Ces intrusions – de fait plus construites qu’il n’y paraît – pratiquées sur les fragments de corps glamour provoquent un trouble. Elles mêlent fascination et répulsion, beauté et cruauté.

Loin de la mise en scène médiatique, les dessins en surimpression du plasticien créent des motifs à l’identité floue. Ils oscillent entre ornementation, tatouage rituel, scarification et souillures. L’artiste prouve à travers elles la prégnance des médias sur notre esprit et notre mode de vie qui vient casser le désir du signifiant du sujet. L’identité y est formatée et divisée. Les virus médiatiques inoculent une sorte de vide absolu. L’artiste propose son contrepoison. Sous le grotesque, où la lumière reste centrale. Elle fait de nous ses papillons. Mais l’artiste récupère ce pouvoir pour nous confronter avec des phrases et des questions qui tourbillonnent autour des top-models : « Avez-vous déjà pensé au suicide ? », « Regarderiez-vous une exécution capitale à la télévision ?», « De quoi vous sentez-vous coupable ? ». Il tente donc de sauver le sens de l’être englué sous le non-être des images. Derrière le kitsch crémeux se cache donc une réversion de la fascination. Sous le fétichisme des apparences, l’artiste propose d’échapper au marketing pour donner aux images une autre destination.

jean-paul gavard-perret

Daniele Buetti, Maybe You Can Be One of Us, Swiss Institute Contemporary Art, New York et Hatje Cantz, Ostfildern, 2013, 232 p. -. 20,00 €.

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