Antonio Tabucchi, Femme de Porto Pim et autres histoires
Antonio Tabucchi hors de ses gonds
Donna di Porto Pim n’est pas vraiment un roman mais plutôt un ensemble de textes qui n’ont pas trouvé place ailleurs dans l’oeuvre de Tabucchi. Au lieu de chercher à les développer, il les a laissé tels quels. Si bien l’ensemble ressemble à quelque chose qui aurait pu être mais qui n’existe pas vraiment ou – à l’inverse – ce sont des semences mais qui germinent mais juste un moment.
Il y a là des îles et des baleines, des naufrages et des amours ratés, un mal de vivre et une mystérieuse poésie. Tout est étrange et familier à la fois. Et l’on se retrouve au sein de l’univers de l’Italien et sa façon d’évoquer les existences entre inquiétude et l’absolu délicatesse de la vie au quotidien.
Les histoires semblent parfois indéfinissables dans leur inaccomplissement. Mais cette façon de dire nous revient en miroir de notre propre existence et de notre devenir. Le tout en des bribes dans lesquelles le morceau de bravoure reste celui qui donne le titre à l’ensemble en sa façon de raconter un amour qui finit mal et dans la violence.
Chaque fois, Tabucchi se nourrit de tout pour nous tendre un jeu de miroirs même lorsqu’il raconte la confession d’un vieux chanteur de restaurant lourd d’inquiétude et de nostalgie mais qui ouvre un espace entre passé et présent.
Le texte « Antero de Quental, una vita », quant à lui, nous ramène dans la vie de l’écrivain Antero de Quental (1842-1891). D’un écrivain secondaire, Tabucchi fait un écrivain vivant par la façon dont il lui redonne voix et existence. « Esperidi, sogno in forma di lettera » devient un voyage vers une île métaphore de notre monde.
Partout, la nostalgie retourne de manière insolite vers les lieux où nous sommes embarqués. Avec elle, vers un monde ignoré qui fascine.
jean-paul gavard-perret
Antonio Tabucchi, Femme de Porto Pim et autres histoires, traduit de l’italien par Bernard Comment, coll. « Du monde Entier », Gallimard, Paris, 2019.