Les exercices de liberté de Jackie Macha : entretien avec l’artiste

Le col­lage est le fon­de­ment tech­nique de la créa­tion chez Jackie Macha. Elle lui sert — hors de pos­tures pré­ten­tieuses dont se drapent tant de pseudo créa­teurs — à dérou­ler le fil de ses nar­ra­tions où l’intime avance mas­qué. L’artiste n’opère pas à cœur ouvert. Elle n’a pas du sang sur les mains mais uni­que­ment de la colle. Pri­vi­lège d’une tech­nique qui peut tout dévoi­ler par tout ce qu’elle recouvre. L’artiste se trouve à l’aise dans un tel jeu. Il cor­res­pond en outre à son sen­ti­ment solaire de la vie et de l’art.

Qu’est-ce qui vous fait lever le matin ?
Sim­ple­ment le fait d’avoir la chance ” de gagner un jour de plus ”

Quels furent vos rêves d enfant ?
Etre libre : déso­béir, ne faire que ce que je veux .….. et je vis comme ça !!!

A quoi avez-vous renoncé ?
A geindre, me lamen­ter. (Renon­ce­ment volontaire !)

D’où venez-vous ?
De l’étreinte amou­reuse de mes parents !

Qu’avez-vous reçu en dot ?
Une sérieuse dose d’optimisme : voir tou­jours le verre à moi­tié plein … plu­tôt qu’à moi­tié vide !

Qu’avez-vous dû pla­quer pour mon tra­vail ?
Rien ! Jamais ! J ai tou­jours été mon boss !

Votre plai­sir quo­ti­dien ?
Me dire :” voyons, que me réserve cette belle journée ? ”

Qu’est-ce qui vous dis­tingue des autres artistes ?
Pas à moi de le dire !

Quelle fut la 1ere image qui vous inter­pella esthé­ti­que­ment ?
La décou­verte du Palais du Fac­teur Che­val à Hau­te­rives (j’étais petite : 6 ans.)

Quelles furent vos pre­mières lec­tures ?
Le ” club des 5 ” et le VIDAL que je lisais en cachette au gre­nier …pour me faire peur ! (j’étais petite…)

Com­ment définiriez-vous votre tra­vail de col­la­giste ?
Une immense liberté ! Pou­voir tout dire en mal­me­nant mes p’tits papiers et redon­ner vie à de vieilles images en les détour­nant de leur sens pre­mier, sur­prendre ! Pou­voir trai­ter à ma manière de tous les thèmes qui me sont chers ; l’amour, l’érotisme, le rock, l’art, le vin .….……la vie quoi !!!!!!! Je ne tra­vaille qu’avec des ori­gi­naux ! Essayez de déchi­rer une pale pho­to­co­pie et une revue de 1930 et vous ver­rez la dif­fé­rence ! La déchi­rure est alors sen­suelle, c est elle qui décide ou elle va ! Un peintre peut refaire deux fois le même tableau. MOI PAS ! Chaque col­lage est unique ! L’un contient un vinyle col­lec­tor des Stones, un autre une affiche rare Her­mès … Folie ? NON ! Pur plai­sir ! Donc je chine. Les bou­qui­nistes connaissent ma douce névrose !! Pour les ” affiches lacé­rées», je vais en Espagne (oui, oui) arra­cher des tré­sors, au bord des routes, sur les pan­neaux d’affichages sau­vages, lam­beaux de papiers ayant subi les outrages du temps ! Ouf ! Jamais tom­bée sur la police espa­gnole, alors que, munie de mon cut­ter, je  “remets” à neuf leurs panneaux !

Quelles musiques écoutez-vous en tra­vaillant ?
Ber­nard Lavilliers, Gains­bourg, Jonasz, Léo Ferré (pour la poé­sie qu’ils glissent dans leurs mélo­dies), les Stones pour leur éner­gie dans leur musique ! Lou Doillon pour sa sen­si­bi­lité. Mozart !!!!! Luz Casal .…quand j ai le blues (tant qu’à faire les choses, autant les faire à fond : pas de larmes de cro­co­diles !), Léo­nard Cohen. La liste est longue : j ai besoin des vibra­tions de la musique, j’en écoute tout le temps !
Une musique peut être le point de départ d un col­lage ! Par exemple ; chan­son de Véro­nique Sam­son ; ” qu’on me par­donne ou qu’on m’oublie ! Je voyage au bout de ma nuit ! Qu’on me prenne comme je suis … mais qu’on me par­donne ou qu’on m’oublie !!!! ” J en ai fait un collage.

Quel livre aimez-vous relire ?
“Le para­doxe amou­reux” de Pas­cal Bruckner.

Quel film vous fait pleu­rer ?
“Le choix de Sophie” avec Meryl Streep (je finis en sanglots)

Qui voyez-vous dans votre miroir ?
Ce que je vois ? Une grande gamine avec des rides.

A qui n’avez-vous jamais osé écrire ?
Aux gens à qui je n’ai rien à dire !

Quel(le) ville ou lieu a pour vous valeur de mythe ?
Les cabanes tchan­quées, l’île aux oiseaux sur le bas­sin d’Arcachon (mon ” bout du monde ” à moi… magique !)

Quels sont les artistes dont vous vous sen­tez le plus proche ?
Jacques Vil­le­glé, Bas­quiat. Pol­lock. Kolar. Guy Savel. Frida Kahlo. La liste est longue de ceux qui me touchent le cœur, Picasso. Tamara de Lem­pi­cka. Lichtenstein.

Qu’aimeriez-vous rece­voir pour votre anni­ver­saire ?
La lampe d Ala­din (avec le génie, bien sûr) et faire le sou­hait de m’enlever quelques années .…juste pour avoir le temps de faire tout que j ai encore à faire !

Que défendez-vous ?
La liberté !!! Mais le res­pect d autrui ! Que les femmes res­tent de vraies femmes jusqu’au bout des ongles et que les hommes soient de vrais “mecs», des héros.

Que vous ins­pire la phrase de Lacan : “L’Amour c’est don­ner quelque chose qu’on n’a pas à quelqu’un qui n’en veut pas”?
Oh non .….……L’amour est essen­tiel, mais sou­vent nous nous four­voyons ! Et alors ? C’est toute la dif­fi­culté du rap­port amou­reux ! Je pré­fère la phrase de Cécile Sorel : ” je me suis éprise … je me suis méprise .….Je me suis reprise ” …(Telle est ma devise !)

Enfin que pensez-vous de celle de W. Allen : “La réponse est oui mais quelle était la ques­tion ?”
Le ” oui ” est tel­le­ment plus facile à dire que le “non. (On pense sou­vent : “oui mais”. Le” oui ” peut se dire par lâcheté, par sou­mis­sion …!!. Je n aime que le “oui” de l’abandon, de l orgasme. Le “non” est beau­coup plus dif­fi­cile à for­mu­ler ! Pour dire “non «, après il faut argu­men­ter. Il faut du cou­rage pour dire non ! Après de nom­breuses années de “oui “, j’ai décidé de pas­ser au ” non ” et ce fut le début de ma LIBERTE !

Pré­sen­ta­tion et entre­tien sréa­lisé par jean-paul gavard-perret pour lelitteraire.com le 31 décembre 2013.

1 Comment

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One Response to Les exercices de liberté de Jackie Macha : entretien avec l’artiste

  1. granet jackie

    lors de mes vacances sur le bas­sin d“arcachon ‚j’ai ren­con­tré jackie macha et vu son expo­si­tion de collages,complètement atypique,ou la palette d’images se déroule comme un fil conduc­teur qui nous amène dans le délire de l’artiste,sensualité,érotisme,douceur,et ‚on lit une belle histoire.….…

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