Emmanuel Rabu propose ici un texte fractal où la douleur de la perte se dit dans le dépouillement : elle s’émet par la bande et pourtant de manière directe en évitant le pathos.
L’auteur est à la fois pudique et ne tergiverse pas. Pourtant, tout se dit en une aporie de son retour à l’essentiel et où l’économie de la mise en page souligne des effacements et semble conjurer toute possibilité d’épanchements.
Ne reste qu’une description factuelle et comme télégraphiée en vers des plus sobres et purement informatifs. Néanmoins — ou à cause de cela -, le texte possède une force rare. Car le non-dit passant entre de tels vers et mots donne à cet esto memor un caractère particulier.
Le narrateur se retrouve en effet l’âme à genoux dans l’air sombre, encore épais, devant, en même temps qu’au centre des hauts murs, le désastre de la perte qu’il pénètre comme une cathédrale, non comme sa crypte ressurgie vers le ciel.
jean-paul gavard-perret
Emmanuel Rabu, Saison été seize, Editions Dernier Télégramme, Paris, 2023, 56 p. — 10,00 €.