Quand l’Anticipation se fait dystopie
Un récit d’anticipation qui reprend le thème de la survivance de quelques-uns pour reconstruire une civilisation détruite par la folie de quelques meneurs tyranniques, de quelques déments aux ambitions démesurées. Mais, cette fois, la tâche revient à un groupe d’orphelins, des jeunes choisis par une entité pour leurs qualités physiques ou mentales.
Cette dystopie ouvre sur un petit monde si rigide que certains ne vont plus penser qu’à s’en échapper. Et le récit, après avoir planté le cadre, va développer deux épopées, deux approches, ceux qui se sentent à l’aise dans cette organisation et des rebelles qui refusent cet état et souhaitent en voir plus, avoir plus d’autonomie.
Aurelle Gaillard, qui fut enseignante avant de devenir scénariste, imagine une population d’enfants et d’adolescents aux profils divers et variés permettant moult situations, la mise en œuvre d’opinions et d’actions divergentes.
Lorsque Welling se réveille dans une chambre inconnue, elle a un pansement sur l’index droit. Elle se précipite quand elle entend Moé, son jeune frère, l’appeler. Ils ne savent pas où ils sont. Ils dormaient dans un dortoir de l’OPE et se réveillent ici. Parce que Moé a faim, ils sortent et rencontrent Kostia.
Ils rejoignent d’autres enfants aussi perplexes qu’eux quand un écran géant s’allume. Ido Stavanger, le fondateur des OPE — Orphelinats Privés d’Excellence — leur explique qu’ils sont sur l’île d’Adenaom, au cœur du Pacifique. Ils sont les survivants d’un monde qui n’existe plus. Les guerres, les épidémies ont eu raison de toutes les espèces, qu’elles soient animales ou végétales. Sur l’île, ils sont protégés par une bulle et doivent construire une communauté humaine aussi parfaite que possible.
Mira, une Intelligence Artificielle, va orchestrer leur existence, une existence bien ordonnée au point de devenir très pesante pour certains. Et alors…
Si les couleurs sont signées de Degreff, le dessin est assuré par Gabriele Bagnoli, illustrateur italien originaire de Vérone. Il opte pour un graphisme semi-réaliste, lorgnant sur quelques constantes du manga. L’expressivité des protagonistes est bien rendue comme le dynamisme des attitudes. Les décors futuristes donnent une belle vision d’anticipation.
La mise en couleurs complète heureusement les dessins aux traits légers pour dimensionner les reliefs.
Avec cette série, Auzou BD propose son premier récit d’anticipation. Cet album présente une ambiance bien attractive avec ce scénario aux données addictives et ce graphisme qui a tout pour mettre en valeur l’intrigue.
serge perraud
Aurelle Gaillard (scénario), Gabriele Bagnoli (dessin) & Degreff (couleurs), La Bulle — t.01 : Bienvenue sur Adenaom, Éditions Auzou BD, avril 2023, 80 p. — 13,95 €.