Mathias Lair, Proèmes indiens

Ether et terres

Mathias Lair nous emporte dans un monde du mys­tère où résonnent des réfé­rences à la poé­sie de l’Inde et ses per­son­nages mythiques.
Le poète se fait “voyant sen­si­tif” et, face à de tels “proèmes”, “les Méta­mor­phoses d’Ovide : ne sont qu’un vul­gaire remake” d’un monde plus pro­fond là où le corps qui donne de l’amour une vision pour cer­tains bala­frée mais qui immerge les amants dans un monde presque céleste là où l’intimité des corps est à son zénith.

Le voyage dans le Mahâ­nari Express se double, par le rythme de boogie-woogie et de stac­cato du train, d’un voyage men­tal. Si bien qu’aux images du réel se mêlent celles d’une dérive dont le livre devient la nar­ra­tion poé­tique là où le désir est ramené à son essence : “la pre­mière graine de la conscience“
A une écri­ture du monde tel qu’il est, se trans­posent les sou­ve­nirs et les évo­ca­tions des dieux de l’Inde moins pudiques que celui de l’occident. Deux espace-temps se répondent. Les croyances antiques nour­rissent un tel dépla­ce­ment outre­ment géo­gra­phique et temporel.

Un évan­gé­liste il y a peu encore a tenté de conver­tir les des­cen­dants de ceux qui, depuis soixante mille ans, sont por­teurs de croyances qui en de telles régions per­durent. Mais il n’a pas eu le loi­sir “d’importer sa grippe bien / phy­sique ni sa spi­ri­tuelle vérole”.
Reste alors la folle espé­rance d’un amour qui dépasse les visions de notre civi­li­sa­tion ? Celle-ci trop long­temps ignora le vide qui mène à la plé­ni­tude, de même que le zéro sauf celui de conduite.

Cela valait bien un tel livre et ses médi­ta­tions. Elles ne se privent pas d’humour là où nous ne l’attendions pas mais qui donnent, à tra­vers l’attention aux Védas, une sorte de jouis­sance abso­lue. Ici, tout parle : l’esprit et le corps. La divi­sion pre­mière fait le jeu d’une forme de mul­ti­pli­ca­tion. Elle nous ramène à l’origine de la créa­tion comme à ce qu’elle offre aujourd’hui via même le numé­rique.
Dès lors, les mots reviennent à leur signe essen­tiel, à savoir que “toute vérité est / pour ainsi dire”. Ce que tant d’écrivains semblent ignorer.

Lair évite leur vue de l’esprit. C’est pas­sion­nant et envoûtant.

jean-paul gavard-perret

Mathias Lair, Proèmes indiens, Edi­tions Pétra, Paris, mai 2022, 108 p. — 15, 00 €.

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Filed under Chapeau bas, Poésie

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