Pour Sarah Fisthole, il existe diverses formes de ciels : gouffres, trous, couleurs semblables à celle du sang — même dans ses dessins en noir et blanc. La monstruosité se condense ou s’ouvre de façon à être inflammable.
La combustion prend l’aspect d’une flamme, de torches mouvantes ou d’étoiles filantes. Les astres deviennent les supplétifs de certains désastres.
Saisir la ressemblance n’est donc pas dupliquer du semblable mais rejoindre Blake pour compléter la horde de ses lutteuses, catcheurs ivres, victimes et bourreaux afin d’atteindre ce que Pascal nomme dans ses Pensées la “disproportion de l’homme” mais selon une nouvelle donne.
Le dessin suffit à retenir la douleur d’un cœur, la vivacité meurtrie d’un corps.
Tout joue ici sur la mort (qui est une irruption extérieure) et l’infini en passant de la chimère au réel — et vice-versa.
La fascination qu’exerce la dramaturgie de Sarah Fisthole mêle la vue et le toucher là où tout est empreint de risques violents et d’équilibres subtils. C’est comme si la mort n’était que l’angoisse et la peur de la vérité.
Le mensonge apparaît comme l’impersonnelle réplique aux assauts du ciel, le providentiel atout de notre ardeur de vivre.
Le vivier global des choses, qui prend parfois le nom de “zal” pour en signaler l’âme au détriment des apparences, tombe en anémie. Reste le bal des maudit(e)s.
L’artiste fait de nous des somnambules qui parcourent le temps et se trouvent au seuil de l’autre, du prochain, du semblable, bref du monstre qui va et mord, sacrifie jusqu’au sein de ses alliances.
L’amour est coupé de l’amour par la lumière qui le brûle. Les amants dévoreurs dévorant tournent sur eux-mêmes à l’image de la Terre.
Elle et eux se voudraient centre de l’univers mais ne sont que son revers.
jean-paul gavard-perret
Sarah Fisthole, Elégie organique (Alchimie corpsmique), Fanzinothèque de Poitiers, du 1er avril au 31 mai 2022.