Brigitte Ritschard, Ne pas perdre le fil (exposition)

Les mai­sons de l’être de Bri­gitte Ritschard

Brigitte Rit­schard vit et tra­vaille en Haute-Savoie. Doc­teur en Arts Plas­tiques. son sujet de thèse : “Contri­bu­tion à une esthé­tique du temps, entre errance et ritua­li­sa­tion” répond par­fai­te­ment à son tra­vail de créa­tion dans ses sculp­tures, des­sins, installations.

La récu­pé­ra­tion, accu­mu­la­tion d’objets, la répé­ti­tion de gestes sont à l’origine des rituels sin­gu­liers d’une artiste rare. D’où et par exemple ce tra­vail autour du sachet de thé, qu’elle a exploré pen­dant une décen­nie en s’intéressant aussi bien au conte­nant qu’au contenu. Chez elle, la notion d’enveloppe est impor­tante.
Au sens strict du terme comme com­pris de manière plus large : de vieux pulls par exemple qui habillent et pro­tèges le corps tout en créant à tra­vers eux une histoire.

La créa­trice reprend cette idée de l’enveloppe avec ses tra­vaux sur le thème des mai­sons, “mai­sons des rêveurs”. Cette mai­son est ce qu’en disait Bache­lard : “la mai­son de l’être” pour peu que celui-ci ait une âme suf­fi­sante pour explo­rer les et ses coins obs­curs. L’artiste en pos­sède une et donc les explore dans une série de réseaux à par­tir de pho­tos de ces coins obs­curs envoyés par des amis.
Mais elle s’intéresse aussi à une pra­tique qui a pra­ti­que­ment dis­paru (pour un temps) sous l’effet de la pan­dé­mie : le mariage. Et ce, à par­tir de pho­tos de cette fête, vieux draps (de nuits de noce ?), de pétales gla­nés à la sor­tie des églises. Son regard s’attache aussi — en retour à l’enveloppe — aux coquilles d’oeufs, aux citrons pres­sés (preuve que dans le citron contrai­re­ment à l’homme — du moins selon Valéry — le plus impor­tant n’est pas sa peau) ainsi qu’au sel et sa cristallisation.

Cette omni­pré­sence du poé­tique qui est traité chez la créa­trice non sans humour (bien au contraire) dans le quo­ti­dien est impor­tant. Il per­met au regar­deur d’être moins seul et moins bête avec la vie car ce qui nous entoure prend une dimen­sion poé­tique aussi baroque qu’exigeante. Si bien qu’il existe chez Bri­gitte Rit­schard un côté sur­réa­liste mais sans jamais tom­ber dans la moindre cari­ca­ture en dépit de l’humour.
Sur­git un théâtre qui devient l’envers du décor de notre quo­ti­dien. Et il suf­fit à la créa­trice d’une esquisse crayon­née pour déjà construire des images rares, aussi denses qu’impalpables.

Tout paraît naître en des lisières, tout bouge de manière étrange. C’est comme si des pois­sons pré­fé­raient fouiller les mon­tagnes des Alpes que res­ter dans les lacs des Savoie. Ceux-ci deviennent le lieu amnio­tique où — qui sait ? — des mes­sieurs d’âge mûr rêvent de faire des car­tons sur tout ce que l’artiste leur tend.

lire notre entre­tien avec l’artiste

jean-paul gavard-perret

Bri­gitte Rit­schard, Ne pas perdre le fil, Gale­rie du Tour­nant, Saint Alban de Mont­bel (73), du 21 mai au 4 juillet 2021.

1 Comment

Filed under Arts croisés / L'Oeil du litteraire.com

One Response to Brigitte Ritschard, Ne pas perdre le fil (exposition)

  1. Villeneuve

    Sachets de thé , citrons pres­sés , draps de mariés . Tout est embaumé puis sublimé depuis un passé sur­anné dont JPGP sait trou­ver le réseau des œufs d’araignées .

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