Jean-Michel Maulpoix s’interroge ici sur la “nature” du poète. Il analyse les rapports au corps que chacun d’eux entretient et devient le modèle.
Le tout dans l’ambition de créer “une physiologie de la poésie” comprise comme fonction existentielle et d’expliquer comment le corps transcende sa pensée même si l’essayiste ne va pas si loin.
Il est évident que tout créateur s’engage dans un travail physique et mental. L’un ne va pas sans l’autre si bien que Maulpoix enfonce des portes ouvertes. Chaque poète en effet — pour provoquer l’écriture — se soumet à divers types d’exercices physiques plus ou moins inconscients. Sans eux, l’oeuvre n’est qu’un feuilletage superficiel de la densité humaine.
Il faut la résistance de la “viande” (Artaud) afin de créer une nouvelle intelligence et un langage inconnu
En guise d’illustration, l’auteur anatomise trois poètes : Victor Hugo, Henri Michaux (“skieur au fond d’un puits” selon sa célèbre formule) et Michel Butor. Mais c’est une évidence que tout poète porte en lui une dynamique physique qui lui est propre et dont est tributaire l’état de ses facultés et de sa création.
Cela lui permet de se donner en tant que poète le sentiment d’exister en toute liberté.
La poésie sera toujours le plus noble exutoire et de la conscience et du corps. C’est ce dernier qui rattache le créateur sur la terre hostile à son rêve divin. Mais ici les analyses de Maulpoix restent attendues. Le corps est finalement détrôné par la conscience même si chez Michaux un pas de plus fut franchi.
Nous aurions aimé voir l’auteur affronter des cas tels que ceux de Sade ou Artaud afin de voir comment le corps pénètre et mûrit en ses tréfonds tout poème.
jean-paul gavard-perret
Jean-Michel Maulpoix, Anatomie du poète, José Corti, 2020, 244 p. — 20,00 €.