Princesses des blancs et des gris, juges des couleurs, ouvreuses des abysses, Vanda Spengler et Tamina Beausoleil montrent combien le mystère du corps reste entier. Elles guident au pays des angoisses, de la douleur et au vif de ses nœuds.
Par leur respiration visuelle et mentale, l‘écho de la violence revient étouffé.
Les deux créatrices mêlent le pur et l’impur, le dedans et le dehors dans des images qui ne peuvent évoquer que de loin le silence. Il n’en reste que l’allusion.
Mais, sans lui, nous ne pourrions faire l’expérience de telles “épreuves”. Elles véhiculent un sens dont il est la démesure. Infiniment proche et lointaine.
Nul ne sait jamais, en dévorant de telles images, si c’est de la viande au coeur des absides et des arches. Un de nos yeux est sur sa berge. L’autre dans le fleuve de filets de sang.
Existent pourtant les premières rumeurs d’être.
A vue très intime, Vanda Spengler et Tamina Beausoleil produisent une marche incertaine et un huis clos qu’elles opèrent.
L’ “Ecce homo” — du moins ce qu’il en reste — est déhanché des tempes aux fessiers, des temples aux brasiers.
De tels fantômes sont brûlants dans le glacé de leurs labyrinthes et ogives. Le corps est pénétré : un regard pour la peau, un pour la chair. Les deux pour Vanda Splengler et Tamina Beausoleil.
Mais se perdre dans la fascination de leurs images, c’est renaître un peu. L’heure avance. Voit-on moins noire l’arrivée de la nuit ?
En tous les cas, elles rappellent qu’aimer n’est pas jouir. Mais qu’il ne faut pas pour autant s’arrêter à la souffrance et bronzer sur le sable de l’amertume.
Sous la pluie d’été ou d’hiver, le corps-vie est un roman. Un roman d’exil, tombé du bateau.
Nous sommes vieux de mille ans avec un cœur d’enfant face aux propositions des deux insidieuses sorcières sourcières.
A la douleur pas de réponses de cire, mais de circonstances.
Deux réponses “militantes”, loin des idéologies ambiantes.
Pluie d’hiver, pluie d’été.
jean-paul gavard-perret
Vanda Spengler & Tamina Beausoleil, Carmina, exposition collective de 13 plasticiens, “Carmina”, collectif Action Hybride, Little Big Galerie 45 Rue Lepic, 75018 Paris jusqu’au 20 août.