Ovide fut le premier blasphémateur en rappelant que l’origine de la création fut le fait des hommes et non des dieux. Les seconds, avec leurs métamorphoses, ont tenté — tant bien que mal - de réajuster ce que les premiers ont créé.
Bref, ils ont joué le rôle que tient désormais Gheude : celui de réparateur mécano des erreurs et errements humains.
En conséquence, si la fiction est au coeur de la poésie d’Ovide (qui ne fit que reprendre des contes immémoriaux), Michel Gheude en provoque la reprise ou plutôt la renaissance en une recréation des plus postmodernes. Son texte est génial. L’éros est là brûlant aux milieux des êtres et du centaure qui, au besoin, se jette sur l’épouse vierge d’Hercule.
Elle est médusée par l’énorme gland de la bête et le parfum animal d’un tel organe. Pour le moins, elle ne s’en trouve pas forcément marrie.
Scanreigh souligne les savoir-faire érotiques, leurs écarts et éclats. Et qu’importe si les hommes sont moins membrés que le centaure. Leur pénis ballotte piteusement mais les femmes savent les exciter de leurs paroles amènes en se traitant elles-mêmes de bêtes, femelles, chiennes ou chattes en chaleur dans l’espoir — couronné de succès — que les bikers en blouson noir les renversent sur leur moto.
Les modalités d’interventions sont nombreuses. Et Gheude possède le génie de ne pas piétiner dans le passé. Tout tangue en des corps fourrés et aux rythmes et tonalités des cris sauvages de la jouissance et de l’abandon. Les mâles ici sont habillés par Jean-Paul Gaultier et les femmes ont des dessous chics de chez Chantal Thomas.
Celles-ci courent parfois le risque de pleurs mais leurs attentes ne sont pas forcément délétères…
jean-paul gavard-perret
Michel Gheude, La prophétie d’Ocyrhoé, dessins de Scantreigh, Editions Au coin de la rue de l’Enfer, Saint Etienne Les Orgues, 2020, 72 p. — 13,00 €.