Avances courtisanes postmodernes
Le public s’installe devant un décor postmoderne, dont les éléments sont symboliques plutôt que constitutifs. Un ordinateur interrompt la chanson guimauve pour s’adresser au public, prononcer les avertissements d’usage sur un mode comique. Une femme vient se prélasser sur son fauteuil. Les objets connectés jouent le rôle de serviteurs. La marquise s’habille tandis qu’un prétendant hésite à sonner à la porte.
On assiste à une actualisation scénique de la comédie de Musset : des bruitages figurent la solennité du château. La marquise a ses humeurs, elle dit « perdre le talent de vivre ». Le dialogue s’instaure par esquives entre la marquise et son histrion. Les échanges volontiers facétieux constituent une satire des usages des courtisans qui se répandent dans la société. La mise en scène a le mérite d’actualiser le texte et de ne pas se prendre au sérieux.
Les comédiens s’invectivent, se jouent des attentes du public, dynamisent le propos de la pièce, certes datée. Les personnages exagèrent jusqu’à porter au ridicule l’expression de leurs répliques, se plaisent à montrer leur jeu. Les protagonistes de ce dialogue biaisé ne cessent de se menacer de rupture. Les acteurs se lancent dans des mimes un peu ambitieux. Une moquerie sur les usages, que la marquise se plaît à conspuer, non pour en déjouer l’effet, mais pour mieux jouir de l’exhibition des procédés convenus.
Lors de l’évocation de son éducation de jeune fille, la marquise pourrait avoir des accents de la Merteuil dans sa lettre 81, mais la défense de la tradition par le prétendant, la recherche d’autonomie de la conquise ne s’expriment que dans le cadre d’une comédie légère.
Un spectacle plaisant, bien senti, mais un peu complaisant, en ce qu’il se montre satisfait de son propre déploiement.
christophe giolito
Il faut qu’une porte soit ouverte ou fermée
d’Alfred de Musset
Mise en scène Anne-Sophie Liban et Mathias Fortune Droulers
© Stanislas Liban.
Avec Anne-Sophie Liban et Mathias Fortune Droulers
Théâtre Le Lucernaire, Paris
Collaboration artistique Julie Brochen ; création lumières Cynthia Lhopitallier ; assistante à la mise en scène Katia Miran ; idée originale Yohan Guion ; scénographie Marion de Villechabrolle ; costumes Audrey Belin ; cration son Rozenn Lièvre ; production Compagnie Le Homard Bleu ; coréalisation Théâtre Le Lucernaire, Lieu partenaire de la saison égalité 3 initiée par HF Île de France.
Soutiens : Spedidam, Cardio Renal, Jaymot, Le Safari, Les Nouveaux Ateliers.
Remerciements : Julie Brochen, Stanislas Liban, Jérôme Almeras, Maurice Bérenger, Yannick Le Restif.