Valérie Belin, China Girls (exposition)

Valé­rie Belin et les belles captives

Pour sa série dans la suite de “Super Models”, “All Star” et “Pain­ted Ladie”, Valé­rie Belin a choisi un titre spé­ci­fique. Une « China Girl » dési­gnait l’actrice ano­nyme sou­te­nant la charte de gris pour éta­lon­ner la pre­mière image qu’on insé­rait dans l’amorce d’un film afin d’en faire des copies. Par exten­sion, une « China Girl » devint le terme géné­rique pour dis­tin­guer cette pre­mière image avant qu’elle prenne une accep­tion plus large (on pense au titre de David Bowie).
Vale­rie Belin met en scène des jeunes femmes posant « telles des actrices incar­nant des per­son­nages ima­gi­naires » mais aux rôles d’accessoire. Par­tant de ce sté­réo­type, l’artiste — à tra­vers trois modèles presque inter­chan­geables -  refonde le por­trait. De tels gei­shas au ser­vice des came­ra­men sont réin­ter­pré­tées pour incar­ner, pré­cise la pho­to­graphe, « le rôle d’une belle cap­tive, vivant dans un envi­ron­ne­ment merveilleux ».

Leurs habits élé­gants  laissent  poindre leurs jambes au milieu de ce qui res­semble qua­si­ment à un maga­sin de curio­sité dont elles deviennent le bijou. Fausses anti­qui­tés, por­ce­laines de Chine ins­pirent les titres : “Bohe­mian Glass Cup, Swan Neck Vase”, etc.. Manière encore d’ironiser sur  le por­trait et sa fan­tas­ma­go­rie bour­rée de détails où le modèle semble se perdre.
La satu­ra­tion crée une den­sité entre les divers plans selon un pic­tu­ra­lisme appuyé qui peut ren­voyer à divers temps de l’histoire de l’art. Grâce aux tech­niques du “matte pain­ting” et de la sur­im­pres­sion, Valé­rie Belin joue d’effets de plans et de plis  pour trans­for­mer le por­trait en pay­sage men­tal ou en un véri­table songe hors temps.

Existent là des évo­ca­tion énig­ma­tiques où chaque modèle fluc­tue dans une atmo­sphère. Par le souci du détail, la “China girl” devient  la prê­tresse d’un rite mys­té­rieux. Elle appa­raît  néan­moins et para­doxa­le­ment absente ou déta­chée au sein d’un féti­chisme par­ti­cu­lier cher à la créa­trice. Vivants, ses modèles semblent  figés « comme des pou­pées de por­ce­laine » dans un arti­fice pro­grammé. Mais de tels “objets” gardent néan­moins toute leur âme.

jean-paul gavard-perret

Valé­rie Belin, China Girls, Gale­rie Natha­lie Oba­dia, Bruxelles, du 15 Novembre 2018 au 22 Décembre 2018.

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