Daniel Defoe, Robinson Crusoé (Vie et aventures de Robinson Crusoé écrites par lui-même) (La Pléiade)

L’éter­nité du style

Pour cette édi­tion hors-série, la Pléiade a bien fait les choses avec, en dehors de la tra­duc­tion, plus de 200 illus­tra­tions, une pré­face de l’auteur lui-même et du tra­duc­teur choisi pour ce livre d’exception. Pre­nant le parti inverse de celui choisi dans la même col­lec­tion pour la reprise des œuvres de Kafka ( à y regar­der de près, elle n’apporte guère à la pre­mière ver­sion parue dans la même col­lec­tion), Gal­li­mard a décidé de reprendre une « vieille » tra­duc­tion de 1836. Elle n’est sans doute pas la plus pré­cise et fidèle si l’on s’intéresse à la « lettre » du texte, mais elle pos­sède une dimen­sion d’envol.
A cela une rai­son majeure qui prend de court la « folie » d’un tel choix. La tra­duc­tion n’est pas réa­li­sée par n’importe qui. Le poète roman­tique noir et déca­dent Pétrus Borel l’a « com­mise ». Il existe dans son appré­hen­sion du texte un esprit com­pa­rable à celui de Bau­de­laire tra­duc­teur de Poe. Preuve qu’il suf­fit qu’un poète s’empare d’une œuvre pour lui don­ner un lustre inusable.

Le texte — même s’il n’en a pas besoin — s’en trouve régé­néré. Choi­sir la tra­duc­tion de Borel en effet, ce n’est en rien faire preuve d’un esprit « vin­tage » mais pré­ser­ver l’œuvre de la rouille du temps. De fait, Borel conserve l’esprit vision­naire du texte. Le roman une nou­velle fois enflamme et rend rêveur au moment où, plus que jamais, cette fic­tion dans son aspect fan­tasque garde toute son actua­lité.
Est-il besoin de rap­pe­ler que Robin­son Cru­soé reste un monu­ment lit­té­raire, créa­teur d’un mythe rous­seauiste ? Ce n’est donc pas un hasard si un roman­tique a donné à ce livre une ver­sion fran­çaise quasi définitive.

jean-paul gavard-perret

Daniel Defoe,  Robin­son Cru­soé, trad. de l’anglais par Pétrus Borel. Suivi de Pétrus Borel, un loyal inter­mé­diaire par Jean-Luc Stein­metz, Édi­tion de Bau­douin Millet, Gal­li­mard,  Biblio­thèque de la Pléiade, Paris, novembre 2018, 104o p.  — 52,00 €.

1 Comment

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One Response to Daniel Defoe, Robinson Crusoé (Vie et aventures de Robinson Crusoé écrites par lui-même) (La Pléiade)

  1. Villeneuve

    Oui le gar­çon­net JPGP et le sieur Cru­soé sont en fra­ter­nité et rien ne vaut le tapis rouge de la Pléiade . Mais connaître la col­lec­tion fon­dée il y a un siècle par Pierre Lafitte est un rare bon­heur . Henri Duver­nois adapte Robin­son pour les enfants .C’est envoutant.

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