Emmanuelle Bayamack-Tam, Arcadie

Roman de genre

Face aux amou­reux omni­vores et res­tant dans l’intersexuation assu­rée par une grand-mère LGBT, la nar­ra­trice d’Arca­die veut se sen­tir fille tout en se fai­sant appe­ler jeune homme ou mon­sieur en jeans, short et bas­ket. En atten­dant et dans sa “liberty house”, elle inves­tit le coeur du genre avec sa play­list dis­cu­table.
Farah (c’est son nom) vit ainsi parce que sa mère est électro-centriste en ce lieu et com­mu­nauté idyl­lique et pas­to­rale où cha­cun fait l’amour avec tout le monde. Un homme (Arca­die), laid mais cha­ris­ma­tique gou­rou ini­tia­teur, devient l’amant de cette Farah sans fos­settes. Tout se déroule en paix jusqu’à l’arrivée d’un migrant.

Le lec­teur pour­rait craindre le pire mais l’irruption ne fait que cor­ro­bo­rer des pro­blèmes qui étaient là avant. Ce petit monde mixé est décrit avec grâce là où Farah semble libre dans ses mou­ve­ments et ses “déviances”. Le migrant devient de fait non un intrus mais un visi­teur qui n’entraîne pas la folie mais une voie médiane. L’intersexuation, la migra­tion, le han­di­cap donnent para­doxa­le­ment une lour­deur néces­saire contre l’inattendu.
L’écriture est assez dérou­tante pas son ampli­tude buco­lique et des dia­logues tri­viaux où le monde s’interprète dans une liberté de pen­sée à tra­vers et par exemple la ques­tion du genre. Existe tou­jours une fan­tai­sie certes moins cho­quante (qu’on se ras­sure…) que chez un Tony Duvert par exemple.

Pointe  mal­gré tout un appel à la révo­lu­tion de la jouis­sance. Si bien que ce livre à idées se trans­forme en texte à élan – même si le déve­lop­pe­ment du temps est peu pré­sent  en dépit des flash-back. Cette trans­fi­gu­ra­tion de l’existant reste de l’ordre de la para­bole et du dis­cours certes sub­til mais en tant que péti­tion de prin­cipe attendu. Elle appelle néan­moins au fran­chis­se­ment des fron­tières ini­tié par Michaux et Musil (entre autres) salués en fin d’ouvrage.

jean-paul gavard-perret

Emma­nuelle Bayamack-Tam, Arca­die, P.O.L édi­teur, 2018, 448 p. — 19,00 €.

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