Il existe dans les dessins ludiques (mais pas seulement) de Sarah Haug une puissance acidulée qui ne prend pas forcément la cendre pour de la braise. Ses lapins pourtant sont des « durs » qui refusent la formule : quand c’est fini c’est fini. Enfin presque. Seraient-ils capables d’être de ces amoureux ou joueurs boiteux qui oublient leur béquille sur un banc des quais du Léman ?
De tels lapinous deviennent les images iconoclastes de la condition humaine. Chaque œuvre reste une balle perdue qui nous touche en une époque qui a mis un bémol à la farce.
Ici elle transforme les instincts en poésie, fiance le cosmos à l’intimité. Avec en filigrane une partition particulière qui décode le trémolo des violons. La souffrance est tue. Se tourne parfois en masque, en comédie. Chaque lapin semble penser que cela vaut la peine d’aimer, quand bien même on devrait payer un impôt cher pour chaque baiser.
L’artiste transforme une nuit d’encre en une constellation de lumières, transforme le chaos en gouttes de tendresse et d’humour.
jean-paul gavard-perret
Sarah Haug, Rabbit Rabbit Rabbit, Galerie Quark, Genève, exposition du 14 septembre au 20 octobre 2018.