Marianna Rothen, Shadows in Paradise

Les parou­sies de Marianna Rothen

Muses et amies de la série « Sha­dows in Para­dise » ont été prises par Marianna Rothen en deux moments : dans sa mai­son à l’abandon puis après sa réno­va­tion. Les por­traits sont pris au Pola­roid puis scan­nés et impri­més en numé­rique.
Ce trans­fert crée une atmo­sphère étrange et vin­tage. La créa­trice y fait réfé­rence autant mais avec facé­tie au « Mul­hol­land Drive » de Lynch, à « Trois femmes » d’Altman qu’à Per­sona » de Berg­man, films dans lequel l’identité est mise en abyme.

Suite à « Snow and Rose & Other Tales », cette série rend l’univers énig­ma­tique, selon un ordre moins fée­rique mais léger et tou­jours dégagé de la pré­sence du mâle. L’univers devient trouble ; indé­cis sans que Marianna Rothen ne donne des réponses. Une dis­tance s’insinue entre les femmes : à elles-mêmes, aux autres et au monde. Le « sus­pens » demeure sans qu’un flé­chage indique son orientation.

Les fleurs bleues de l’amour voient leurs envols d’antan se trans­for­mer en culpa­bi­lité, ratage ou omis­sion. Sur­git un vide majeur. Il a un nom. C’est l’existence. Toute une mémoire, réelle ou ima­gi­naire y est enga­gée. Un tel par­cours est non de l’ordre de la mol­lesse mais de la “ pointe” capable de per­mettre l’apparition de phé­no­mènes qui sans eux demeu­re­raient inaper­çus.
Ils per­mettent de désen­bus­quer des pans de l’identité cachée car comme le sou­ligne Win­ni­cot : “ Où se trouve l’identité sinon dans les images qu’on ignore ?” A la recherche de constel­la­tions fon­da­men­tales, l’artiste per­met de voir, de com­prendre autre­ment en lais­sant appa­raître des états inter­mé­diaires qui nous arrachent au cer­clage de la divi­nité de l’image telle qu’elle est le plus sou­vent offerte dans réduc­tion de la fémi­nité et ce, afin d’exprimer et de mon­trer ce qui se passe dans l’entre deux : entre le réel et ce qu’on veut nous en montrer.

jean-paul gavard-perret

Marianna Rothen, Sha­dows in Para­dis, Edi­tions The lit­tle black Gal­lery, Londres, 2018.

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