Profondeurs irritées et surfaces irritantes
Par son art du feu Elsa Alayse renvoie l’art à la consistance d’un organe plein (et parfois visible) à travers les matières « organiques » qui le constituent. L’artiste incarne une “ corporéité ” anthropomorphe et/ou animale par laquelle la matière travaille la réversion figurale — ainsi que la logique habituelle du repli imaginaire — en transformant la matière lui-même en une véritable morphogénèse déroutante et non sans humour.
Ce travail induit au symbole sans renvoyer à une quelconque gloire céleste de l’image ou du corps. Nous sommes loin des écœurantes couronnes qui bordent et entourent la figure christique dans les peintures du XVème siècle. L’artiste remplace la dévotion médiévale et ses représentations de connivence par des sculptures soumises à l’épreuve de la cuisson afin de créer un espace hérétique dans laquelle l’œuvre est celle d’une liturgie païenne qui exalte la vie au sein d’une violence et d’une euphorie. Une telle approche évacue tout maniérisme afin d’extraire un regard dévot qu’on accorde à l’art afin de le remplacer par un regard plus ironique et blanc par delà le nocturne et l’enflammé.
Nous n’abordons plus l’art à travers une vision muséale. Disséminées, de telles œuvres font réfléchir sur la notion même de nature vivante. L’art n’est plus là pour nous faire passer du fantasme à son reflet imité. Il est l’autre que nous ne pouvons oublier : l’autre semblable et frère, animal en entier ou en morceaux qui prennent au besoin des figures de totem où jouent un humour froid. Le tout au sein d’éléments qui en disent long sur la fragilité de l’être. Il s’agit néanmoins d’une drôlerie bien plus que d’une horreur mélancolique.
La sculpture possède soudain une force avènementielle en une entente tacite avec la vie. Nous y sommes moins invités plus que jetés comme s’il fallait préférer la splendeur – fut-elle dégingandée – de la vie plutôt que la douleur du crépuscule.
jean-paul gavard-perret
Elsa Alayse, Exposition, Galerie Picot-Leroy, Morgat – Presqu’île de Crozon, du 14 avril au 13 mai 2018.
Merci de l’intérêt que vous portez à Elsa Alayse. Merci pour ce beau texte.
j’aimerais recevoir votre lettre.
Bien cordialement
Elisabeth Picot-Le Roy