André Velter, Les Solitudes

Le poème est-il une langue apprise ?

Parmi les poètes contem­po­rains, André Vel­ter pos­sède une place impor­tante à la fois par son œuvre mais aussi par sa posi­tion de noto­riété autant chez Gal­li­mard qu’à France Culture. Cette situa­tion le met en écho, rela­tion et intel­li­gence avec toute la poé­sie du monde. Une telle connais­sance ency­clo­pé­dique n’est pas simple à gérer au sein de sa propre créa­tion. Elle pâtit d’une sub­mer­sion.
Face à un cor­pus mon­dial, Vel­ter fait ce qu’il peut pour pré­ser­ver sa propre voix et sor­tir son émo­tion d’une gla­cia­tion. Il se veut « l’oiseleur du temps » por­teurs de « paroles qui ont encore des ailes ». Néan­moins, son écri­ture est enra­ci­née dans une vision post-Apollinaire donc en une « cer­taine » idée de la poé­sie qui manque de « nerf » (Artaud).

Au risque l’auteur pré­fère un cer­tain confor­misme, un ima­gi­naire lyrique qui immo­bi­lise le lan­gage dans une concep­tion un peu sur­an­née. De gré ou de force, incons­ciem­ment ou non, l’auteur emprunte de plus en plus — et loin de son pre­mier “mani­feste élec­trique”  — un che­min his­to­rique. Il avance en com­pa­gnie de poètes anciens dont la marche en leur époque contre­dit l’idée que Vel­ter se fait de l’écriture et son déve­lop­pe­ment.
Le for­ma­lisme de tels créa­teurs était péri­phé­rique : or Vel­ter les prend pour centre de son écri­ture, il en épouse les visions. Mais les temps ont changé. D’où le déca­lage visible dans Les Soli­tudes.

Le poète déve­loppe un tra­vail qui tient plus d’un rituel clas­sique qu’une manière de fluer ou de pro­li­fé­rer. Bref, en dépit de ses nom­breux voyages dans sa jeu­nesse et sa connais­sance d’un champ poé­tique large, il crée une œuvre autar­cique voire égo­cen­trée. Elle se veut au ser­vice d’une subli­ma­tion des plus sérieuses jusque dans ses effets de nos­tal­gie.
Mais en consé­quence le texte est atteint ici d’un fré­go­lisme par­ti­cu­lier au sein d’un culte aux fra­grances par­fois inutiles.

jean-paul gavard-perret

André Vel­ter, Les Soli­tudes, Gal­li­mard, coll. Blanche, Paris, 2017 — 18,00 €.

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Filed under On jette !, Poésie

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