Les amateurs de la série « Les Griffin » trouveront dans le roman d’Amin Zaoui – et même si les univers sont fort éloignés — le même plaisir. Celui d’une farce « armée » et enjouée. « Les Griffin » rivent leur clou à l’Amérique, Zaoui à l’Algérie qui lui est sienne. Les fanatiques et spécialistes des fatwas du pays en prennent pour leur grade : l’alcool coule à flots, le sexe est libre, les femmes tout autant.
L’ensemble est égrainé dans une parfaite drôlerie eu égard aux deux héros du livre. Il s’agit de deux philosophes de la rue au pedigrée particulier : Harys est un chien, Moul son propriétaire. Mais nul ne peut dire qui est la maître de l’autre.
Les deux sont des libertaires même si le toutou trouve la vie de son maître bien trop futile et légère. Mais c’est avec humour qu’il fait état de sa réprobation. Le livre devient une revendication du plaisir ponctuée d’aphorismes du chien « moulant » mais qui ne l’est pas. Et ce, même s’il aboie faussement. Intelligent, il urine sur les journaux. Pas n’importe lesquels : uniquement sur ceux qu’il rejette pour leur idéologie primaire.
Sous forme d’abécédaire, ce roman parangon du « Bouvard et Pécuchet » de Flaubert donne une vision particulière du monde arabo-musulman. On y aime le camembert (mais pas seulement). Et l’auteur — fils spirituel de son héros canin — n’y va pas de main morte face aux enragés. Il leur oppose sa joie de vivre et sa liberté. Le ton et la structure de livre en sont la preuve.
jean-paul gavard-perret
Amin Zaoui, L’enfant de l’œuf, Le Serpent à plumes, 2017, 201 p. — 18,00 €.