Associant photographie et vidéo à la performance et à la danse, Melina Jaouen propose des cérémonies étranges. Elles interrogent la nudité ; les genres, leur possibilité de conjugaison dans un mixage de l’humain et de l’animal . En des assemblages et des visualisations énigmatiques, il n’y a ni haut ni bas mais un seul tenant où les êtres se lovent sans se disjoindre. C’est à peine si le noir et blanc (relevé de quelques couleurs) garde l’anxiété du chemin retiré lorsque les êtres s’abandonnent, perdus peut-être, éperdus sûrement.
L’anxiété tâtonnante anticipe et s’attarde, avec la lenteur d’une coulée sans fin, pour localiser l’endroit où l’emportement, s’arrêtant, commencera. Se multiplient les enjambements, les élancements et les « délies » chères à Louise Labbé. Les êtres retournent à un état rupestre. Les photographies de Melina Jaouen en retiennent le cours non sans un certain sens du rite. Son regard rend jusqu’aux angles morts de métaphores sculpturales la possibilité d’être vivants.
Les corps deviennent des chandelles. Elles se consument et une vie part en fumée. Implicitement, la sexualité vit de rien, de tout — à savoir de petits bouts d’amour. Un regard parfois fait tout. Une joue contre un ventre, l’abrasion reste lente. La vision est profonde et assourdie au sein de prises sombres mais néanmoins lumineuses.
Les couples redeviennent primitifs, recouverts de poussière et de cendre au moment où ils semblent réunis en un instant qui brûle aussi longtemps qu’il y a le feu, là où tout avance par écarts de conduite. Il n’y a même plus à se demander qui de l’une ou l’autre l’emportera : nul vainqueur, ni vaincue : juste l’éboulis des caresses dans la coulée qui emporte. Les êtres n’ont même pas à adhérer, ils s’y confondent.
jean-paul gavard-perret
Melina Jaouen, Exposition, Corridor Eléphant, Paris, Avril 2017.
Waouh !!!
De petits bouts d’amour, enlacements, regards, caresses…
tout y est pour s’y confondre.
Superbe critique Mr Gruyère Suisse.
La photo aussi est très suggestive…Bravo.