L’artiste ne peint jamais que la peinture : elle est en elle
Klara Ianova sait qu’il n’existe pas « de belle surface sans une profondeur effrayante » (Nietzsche) ; pour autant l’artiste n’en laisse rien voir. Ou peu. Elle fait œuvre de discrétion en ordonnant un monde jeté comme un défi face au chaos du réel à coup de sensations, émotions, douleurs, jouissance, fulgurations et opacités. Portraits et paysages sont esquissés, deviennent les figures d’un défi à l’infigurable et au mystère. L’artiste ne peint jamais que la peinture : elle est en elle. Comme le monde, la femme sont en elle.
Jaillit un monde de souvenir. Mais la nostalgie est remplacée par la fraîcheur des rondeurs féminines et des couleurs. Elles sont l’effet d’une volonté de mesure hantée par le démesure de la féminité. Son érotisme est sourdement souligné avec insistance et délicatesse selon un aspect mythique et un aspect contemporain. Dans l’effort de différenciation et de mesure de la démesure, Klara Ianova montre, voluptueusement, des morceaux de corps, simplifiés, figés en emblèmes. En eux travaille la peinture pour la sensation par transparences, épaississements.
En ces peintures, il n’y a rien à voir que de très simple : des formes élémentaires, peintes à plat, frontalement posées dans l’espace , sans rien d’autre pour distraire le regard de leur puissance d’affirmation. Ces formes sont explicitement sexuées, féminines au plus haut point : courbes de hanches selon une réduction schématique du dessin anatomique. La féminité ouvre à une manière de représentation synthétisée (pour un regardeur) non de l’objet mais du sujet de son désir.
Souvent la femme est rêveusement fluide et violemment calibrée, bordée et débordante, géométrisée mais pulsionnelle, animée. Bref, délibérément sommaires, les peintures tirent leur force de leur fascination.
jean-paul gavard-perret
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