Louis Savary, Maintenant que je suis un vieux singe

Le non-sens porté à l’état d’art absolu

Celui qui garde toute sa foi dans les mots n’en est pas pour autant « mys­tique ». Il pré­fère le bleu d’Auvergne au bleu Klein. D’autant qu’athée infusé il a plus que des doutes quant à la béa­ti­tude puisque ses propres che­mins de croix se « rejoignent à l’infini du néant ». Et c’est d’autant plus vrai lorsque, pre­nant de l’âge,  « le vieux singe vieillis­sant » est tur­lu­piné par le concept de temps. Celui-là en perd toutes ses cou­leurs. Ou presque, car sa « mémoire voit rouge ». Cela ne l’empêche pas de « redire la même chose » mais de mieux en mieux. Ce qui le console en se per­sua­dant qu’il aurait pu se prendre pour un homme. Mais il assume sa condi­tion et espère être son der­nier vers : « celui qui ne m’aura pas dévoré ».

Il a encore le temps. Vivant l’art au jour le jour, Savary ne fait pas son âge. Tout chez lui sort de l’insignifiant par la signi­fiance déviée. Le belge fait du nou­veau sans tuer le rêve des autres. Coin­çant ses taci­turnes burnes sur la selle poé­tique d’un vélo aux roues car­rées il n’est pas man­chot même si la recherche poé­tique peut par­fois lui coû­ter un bras. C’est sa manière de voler vers les cimes abys­sales. La rage bat une déme­sure dans les sub­ti­li­tés de non-sens por­tées à l’état d’art absolu bien plus per­for­mant que la maïeu­tique des canailles idéalistes.

jean-paul gavard-perret

Louis Savary, Main­te­nant que je suis un vieux singe, Edi­tions Les Presses Lit­té­raires, 2016, 102 p. — 15,00 €.

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