Jacques Damez a su saisir l’âme de la Gaspésie — cet appendice qui, de l’embouchure du Saint Laurent, glisse doucement vers l’Atlantique. Une vie est là dans de profondes palpitations. Passé les bastions de Québec et une fois quitté les quelques bourgades qui segmentent le territoire, frontières, limites extrêmes, seuils mais aussi « cœurs » ouverts deviennent l’incessant devenir d’un lieu fascinant.
Pour saluer ce morceau d’ailleurs, Damez fait éprouver autant la réalité qu’une forme de fiction de l’indicible. Il transforme la photographie en cérémoniel austère et poétique. De l’hiver comme de l’été surgit une mystique sensuelle. Celle qu’on ressent parfois, au bord du fleuve qui prend des allures de mer, certains soirs d’automne où il arrive que des cétacés croisent les paquebots qui filent vers le monde.
Rarement un photographe a offert une ode aussi magnifique à un lieu qui le mérite si profondément. Les premiers émigrés français purent y quitter un passé nécrosé pour un avenir incessant. Le regardeur se retrouve aux sources d’un lieu qui convoque autant la contemplation que la méditation.
jean-paul gavard-perret
Jacques Damez, Photoponymie en Gaspésie, 15 juillet-30 septembre 2016, Galerie le Réverbère (Lyon), Entrepôt Le Boutilliers& Bros (Québec).