Le sous-titre de cette biographie est particulièrement bien choisi car Madame Adélaïde fut bien plus que la sœur du roi Louis-Philippe Ier. Elle joua le rôle d’une égérie, d’un conseiller politique d’influence auprès de l’héritier de la Maison d’Orléans, entachée du sang de Louis XVI par le vote terrible de Philippe Egalité, et du roi-citoyen qui tenta l’impossible : réconcilier la France d’après 1789 avec la monarchie de ses pères et y greffer le modèle anglais.
Madame Adélaïde fut, comme ses trois frères, marquée par l’enseignement libéral de Mme de Genlis, ce qui lui permit de s’adapter aux temps nouveaux mais sans perdre une foi catholique fervente. C’est d’ailleurs un des nombreux apports des recherches archivistiques de Dominique Paoli. Cette foi permit sans doute à cette jeune fille en réalité fragile physiquement de traverser les terribles épreuves de l’exil auquel la révolution puis le Premier Empire la condamnèrent. Elle ne se maria pas, ce qui sans doute contribua à la solidité de sa relation avec Louis-Philippe, renforcée par la mort précoce de leurs deux autres frères (Montpensier et Beaujolais) et la proximité avec sa belle-sœur Marie-Amélie.
Aussi prudente que le duc d’Orléans pendant la Restauration, elle évita les faux-pas mais joua un rôle que Dominique Paoli décrit comme déterminant dans la prise du pouvoir en juillet 1830, alors même que Louis-Philippe apparaît plus hésitant. C’est à cela que l’on reconnaît les grands personnages de l’histoire, à cette capacité à saisir l’événement quand il se présente. Son influence politique – notamment dans les affaires diplomatiques – fut donc majeure pendant la monarchie de Juillet, mais subtile et discrète, lors des discussions du soir avec son frère, en tête-à-tête. Et on ne peut s’empêcher de penser que sa disparition en 1847 priva le souverain d’un appui décisif face aux émeutes de 1848.
Bref, une très belle biographie, puisée aux meilleures sources, sur un personnage peu connu mais influent de notre histoire.
frederic le moal
Dominique Paoli, Madame Adélaïde. Sœur et égérie de Louis-Philippe, Perrin, avril 2016, 23 €