Christine Crozat et le droit à la verticalité : entretien avec l’artiste

Chris­tine Cro­zat crée des dis­tor­sions plas­tiques qu’elle décline non sans har­mo­nie et selon diverses variables qui prennent le temps de s’installer. Les formes dans leurs cor­ri­dors deviennent des images aussi satu­rées que nues en ce qui tient d’un céré­mo­nial délé­tère mais réso­lu­ment en éclat. Par­fois, une forme semble mou­rir au milieu du rythme visuel avant de reprendre. Se retrouve un défi­le­ment dans le temps et le corps. De telles images ne cessent de brû­ler. L’émotion est pro­fonde : à l’esprit d’en faire bon usage. Tout jaillit pour mordre et qu’importe si les rêves dis­pa­raissent de leurs propres sou­haits. De chaque image tout tombe et remonte.

Entre­tien :

Qu’est-ce qui vous fait lever le matin ?
Le matin tôt je suis pleine d’énergie. La lumière en été… l’idée qu’une nou­velle jour­née com­mence… me mettre au tra­vail…

Que sont deve­nus vos rêves d’enfant ?
Beau­coup de cau­che­mars quand j’étais une petite fille, consciente très jeune d’ avoir à trou­ver ma place qui n’était pas celle col­lée à un frère mort 5 ans avant moi.

A quoi avez-vous renoncé ?

Je ne sais pas quoi dire, car je suis mon fil rouge… j ‘essaie, j’avance, je recule, je construis au quo­ti­dien…

D’où venez-vous ?

Arrière grand-mère peintre suis­sesse née à New York, son mari pas­teur fran­çais à la Chaux de Fonds, une grand mère et ses deux soeurs ( fin XIX ème) étaient ins­ti­tu­trices : elles étaient des femmes actives de souche pay­sanne et ter­rienne. Ma mère était fille de soyeux à Lyon. Meli-mélo de milieux dif­fé­rents qui consti­tue un richesse pour grandir.

Qu’avez-vous reçu en dot ?
De la bonté . D’avoir des parents (qui par­laient peu d’eux, mais qui créaient des choses ensemble). Ils m’ont donné la force de construire quelque chose pour moi.

Un petit plai­sir — quo­ti­dien ou non ?
La sieste : lâcher et reprendre des forces.

Qu’est-ce qui vous dis­tingue des autres artistes ?
Rien de par­ti­cu­lier, je suis tenace, enga­gée dans mon pro­ces­sus de tra­vail, c’est vital… mais je ne suis pas la seule…

Votre pre­mière lec­ture ?
Les livres de Jean Giono

Pour­quoi votre atti­rances vers le “double” ?
Mar­quée, poin­çon­née par une mère jumelle qui ne pou­vait pas envi­sa­ger le “un”. Frères et cou­sins jumeaux. Ele­vée avec cette notion “de gémel­lité. Han­tée par cette ques­tion que j’ai tra­vaillée dans mon art/ pieds et chaus­sures, belle par­tie du corps, fon­da­men­tale pour pou­voir tenir debout et pen­ser. Reflet, ombre…

Quelles musiques écoutez-vous ?
France-culture du matin au soir …j’adore leurs jingle s…et leurs voix…

Quel est le livre que vous aimez relire ?
« L’usage du monde »
de Nico­las Bouvier

Quel film vous fait pleu­rer ?
« Tout sur ma mère »
d’Almodovar.

Quand vous vous regar­dez dans un miroir qui voyez-vous ?
Moi

A qui n’avez-vous jamais osé écrire ?
Pas de réponse

Quel(le) ville ou lieu a pour vous valeur de mythe ?
Tokyo

Quels sont les artistes et écri­vains dont vous vous sen­tez le plus proche ?
Kiki Smith, Sil­via Bächli, William Ken­tridge, Hoku­saï, Dürer, Jan van Eyck, Rogier Van der Wey­dan, Ucello et Piero della Fran­cesca, Jiro Tani­gu­chi (L’homme qui marche) Hiromi Kawa­kami ( Les années douces) .

Qu’aimeriez-vous rece­voir pour votre anni­ver­saire ?
Rien je n’ai jamais aimé ces moments là, c’est beau­coup trop conven­tion­nel et les moments annuels qui se répètent ( noël par exemple) m’angoissent.

Que défendez-vous ?
Le droit à la verticalité

Que vous ins­pire la phrase de Lacan : “L’Amour c’est don­ner quelque chose qu’on n’a pas à quelqu’un qui n’en veut pas”?
Je ne com­prends rien à cette phrase. Trop com­pli­qué pour moi

Que pensez-vous de celle de W. Allen : “La réponse est oui mais quelle était la ques­tion ?“
Il plane.…

Quelle ques­tion ai-je oublié de vous poser ?
Aucune.

Pré­sen­ta­tion et entre­tien réa­li­sés par jean-paul gavard-perret pour lelitteraire.com, le 12 sep­tembre 2015.

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