L’œuvre de Jean Le Gac ressemble à une cavale, à une traversée jusque dans la manière de déplacer les images comme le réel dans une sorte d’autofiction iconographique où l’artiste s’est inventé un double pour mettre tout cul par-dessus tête. Sorte de Beuys (en moins mégalomane), Le Gac s’élève dans son travail contre les figures mythiques qui mettent en scène quelque chose de l’ordre du fétiche. Cela l’insupporte. Il préfère cultiver une sorte de dérision impertinente à travers discours déviants, figurations digressives propres à une exégèse qui n’a rien de chrétienne mais qui ouvre un discours sur la vanité de l’interprétation des images.
L’art est chez lui, depuis les année, 60 performatif, il agit et reste pragmatique. Il ne se ferme aucune porte, déborde et tient aussi compte du fait que ça déborde . Et si l’œuvre part en cavale, ne s’occupe que de ça, ses images travaillent en profondeur ce “ça”, cet inconscient qui n’est rien qu’une surface à trouer où se cache encore plus d’obscurité qu’on pourrait le penser.
L’autofiction plastique n’a rien d’une autosatisfaction. Se chargeant de mettre en branle des courts-circuits et digressions, elle refuse avec humour toute cristallisation des procédés de style. Chaque temps de l’oeuvre continue ainsi à travailler contre le précédent même s’ils sont tous armés de la même langue plastique ébouriffante. Celle-ci donne des armes pour briser tout statu quo au sein d’un “arrangement” dans (et par) ce qui en art est incertain, bancal, dérisoire. Ou considéré (à tort) comme tel.
jean-paul gavard-perret
Jean Le Gac, L’atelier parallèle, Musée de Carouge, Genève, 24 avril — 30 aout 2015.