Le monde de Margot est fascinant. Une telle créatrice sait où elle va : « Je suis à cheval entre deux mondes. Le mien et le vôtre. C’est une question d’équilibre. ». Tout en estimant (à tort) que sa création ne serait pas vraiment d’importance, elle crée et remplit notre émotion, notre intellect par son imaginaire, sa technique et ses émotions. Bref et comme elle le précise : « c’est la magie ancestrale que nous avons oubliée à force d’explications ».
Choisissant son nom d’artiste, celle qui fut fleuriste débuta une pratique artistique professionnelle. Autodidacte, Margot crée un langage plastique original. Ses dessins touchent à un espace mental et sidéral. Ils abasourdissent, sonnent, sidèrent en découvrant des territoires ignorés. L’artiste crée un ordre supra-rationnel où la symétrie joue souvent un rôle important. Diverses fusions se succèdent. Et Julie Crenn rappelle que “les titres de ses œuvres sont d’ailleurs issus de l’espéranto ou bien d’une langue intime qu’elle fabrique au fil des œuvres.”
Tout est profond dans ces “portraits” anonymes par enluminures picturales. Elles contaminent un tirage photographique d’une autre époque, sobre, en noir et blanc. Tout ici est coloré, minutieux par crayons, stylos billes, encres de chines, pastels là où tout un mouvement se déploie en une paradoxale fixité. Celle qui vit en marge de la société et en une relative solitude s’éloigne du monde qui s’agite. Elle y oppose un univers intemporel et néo-surréaliste en grands formats, entre abstraction et figuration,
Margot avec la constance d’un chercheur d’or sans permis de travail n’accepte en rien d’épouser des idées trop acceptables. Elle défend ses positions en refusant de suivre la bonne porte pour lutiner avec des enfers promis. Le tout selon sa rhétorique plastique et sa doctrine esthétique secrète qu’ignorent encore beaucoup de savants lettrés .
L’œuvre est signe d’une résistance absolue quitte à effrayer ou rebuter certains regardeurs ou voyeurs face à des créations compulsives par l’accumulation des formes, lignes, arabesques maîtrisés constamment par sa pertinence. Margot franchit l’étape des pesanteurs du doute et du désespoir dans un exercice de lucidité et un graphisme effusif. C’est donc d’une ambition démesurée et rare afin d’ordonner au plus près sa psyché selon une « voix » et une voie accordées au silence frisant l’innommable et l’inconnu.
jean-paul gavard-perret
Voir son site Margot
Un commentaire composé aussi parfait que l ‘œuvre de l’artiste !