© Simon Gosselin
Devant une grande paroi de bois, un homme et une femme se confient l’un à l’autre leur désaccord. On s’entretient d’un spectacle à venir. Treplev, le fils d’une actrice, s’essaie à l’écriture dramatique. Même si la présentation de sa pièce donne l’occasion au conflit avec sa mère de s’exprimer, on en saisit le sens apocalyptique et moraliste : un ange vient constater l’effondrement de notre espèce qu’il lit comme l’effet d’un mal endémique.
Le texte de Tchekhov ne cesse de placer les personnages en situation d’interrogation sur le spectacle, le temps, la littérature ; tous ont une disposition réflexive qui les conduit à paraître en permanence confrontés à leur avenir, au désarroi face aux options, ou plutôt à la tendance impérieuse qui se présente(nt) à eux.
Stéphane Braunschweig tente de faire de cette intrigue psychologique et familiale une odyssée métaphysique, au risque de lui donner des allures peu seyantes de science-fiction. Ce faisant, il met les acteurs face à leur texte, comme s’ils étaient rendus indépendants de leurs interactions. Il en résulte une valorisation de leur prestation, en même temps qu’une forme d’artificialisation du propos qui n’est pas sans charme.
Si l’on fait crédit à cette perspective, on voit chaque personne aux prises avec sa propre humanité, comme si elle regardait avec dérision les frasques de sa position personnelle. On assiste donc à une proposition originale et intéressante, qui fait de la mouette non pas une victime expiatoire, condition de survie d’une communauté, mais le modèle d’une déréliction programmée qui affecte notre constitution.
christophe giolito
La Mouette
d’Anton Tchekhov
mise en scène et scénographie Stéphane Braunschweig
avec Sharif Andoura, Jean-Baptiste Anoumon, Boutaïna El Fekkak, Denis Eyriey, Thierry Paret, Ève Pereur, Lamya Regragui Muzio, Chloé Réjon, Jules Sagot, Jean-Philippe Vidal.
Traduction André Markowicz Françoise Morvan ; collaboration artistique Anne-Françoise Benhamou ; collaboration à la scénographie Alexandre de Dardel ; costumes Thibault Vancraenenbroeck ; lumière Marion Hewlett ; son Xavier Jacquot ; maquillages, coiffures Emilie Vuez ; assistant à la mise en scène Jean Massé.
Au théâtre de l’Odéon Place de l’Odéon, 75006 Paris, du 7 novembre au 22 décembre, du mardi au samedi à 20h, le dimanche à 15h, relâche exceptionnelle le dimanche 10 novembre, représentations surtitrées en anglais les 9, 16, 23, 30 novembre et 7, 14, 21 décembre représentations avec audiodescription les jeudi 5 et dimanche 8 décembre.
Location www.theatre-odeon.eu ou 01 44 85 40 40.
Le texte d’Anton Tchekhov, La Mouette, traduit du russe par André Markowicz et Françoise Morvan, est paru aux Éditions Actes Sud/Babel, 2001.
Production compagnie Pour un moment coproduction Odéon-Théâtre de l’Europe avec le soutien du Cercle de l’Odéon. La compagnie Pour un moment est conventionnée par le ministère de la Culture – direction générale de la création artistique.