La saveur des pins, du vent et de la mer
Que se passe-t-il dans l’espace des haïkus de Marie-Anne Bruch ? Dans leur lieu étroit — dont c’est la règle -, tout est spacieux au nom de la saison soufflée par une mouvance contagieuse. Chaque haïku crée une énergie légère, aérienne par la précision d’une telle auteure et sa puissance : elle retient sur le clavier des sens ce qui compte et dans l’éventail de l’émotion.
Face à la monotonie et certaines concupiscences animales, et très rigoriste sur sa démarche poétique, Marie-Anne Bruch choisit la maîtrise de la précision, là où un orage, une nuée de moucherons, des « Taches de soleil / dans le sous-bois – Un Renoir / Grandeur nature » créent la fascination.
Dans chaque poème l’horizon se prépare au jour. La recherche devient une exigence : éteindre parfois une certaine lumière permet de la voir se lever entre le vu et le non vu dans l’espoir d’une greffe sur ce qui demeure. Restent aussi des écailles sonores. Elles étonnent en buées de traces où la créatrice retourne vers l’essentiel
Chaque haïku ouvre une fenêtre. Nous avons besoin d’un ciel, d’une silhouette d’arbres, d’un bruissement d’oiseaux. Ici la conscience n’aime pas l’invisible mais elle se dissout, se confond dans une relation trouble créée d’impressions, d’esquisses, de structures
L’ensemble sous son apparent désir d’abstraire un peu — vu la règle du genre — va vers un espace qui ne peut se manifester que par lui. Il y a là des trajets et des contre trajets et, in utero, l’histoire pudique d’une telle femme pour dire le juste, le vrai et le beau.
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jean-paul gavard-Perret
Marie-Anne Bruch, Haïkus de la belle saison, Editions Encres Vives, coll. Lieu, Frontignan, 2024, 32 p. — 6,60 €.