Antres-temps ou l’écriture

Beau­coup raillent mon ver­biage imbé­cile même s’ils gravent des cœurs sur l’écorce des arbres pour de nébu­leuses voi­sines. Je n’ai ni loin ni dehors où les voir. Je les hume à la brume et je m’approche du bord de leur décol­leté. Elles ne les ouvrent pas pour moi. Bref, j’y suis et n’y suis pas. La ques­tion ne se pose pas en ces termes.

Ne ces­sant de me déro­ber, je m’éloigne ris­quant un pied inquiet et l’autre mesuré. Là gît l’angoisse nue, sœur de la vérité. C’est une parente pauvre et mal­me­née. Les voi­sines de rêves, engon­cées dans un tailleur Cha­nel, tra­versent la rue sans me regar­der. Elles ont l’odeur d’oubli sur leur poudre de riz. Je me demande à qui elles montrent leur nudité, mouillées, loin­taines et peut-être obs­ti­nées quand leur bât blesse. Leurs jambes s’écartent et tremblent. Elles cher­chant enfin le terme du poi­son qu’elle subissent en s’offrant par amour, s’endorment. Les traces de leurs songes de peau moite leur refont un visage.

Ainsi rai­sonne mon écri­ture parce qu’elle n’oublie pas l’éruptif, le fou fou­droyant, le « patron » pétu­lant, l’empreinte effer­ves­cente, l’échauffe explo­sive, la fer­veur ful­mi­nante, l’ardent et l’acharné. Alors, comme sur son papier l’écriture ondule, juteuse, incen­diaire en vie pro­fonde et en han­tise. Elle sus­pend l’inauthentique vivace et brouillé de nuit selon une volupté déso­lée. Son sup­port appa­raît lus­tral dans sa manière de se don­ner sans réserve. Au milieu des bat­tues l’éclair, c’est des­cendre vers les hanteurs.

jean-paul gavard-perret

Photo Fred Oh

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