Ella Balaert se transforme ici en ironie et humour afin de produire une forme de ses mémoires de 30 années. En choisissant le format de l’abécédaire, l’auteure revient avec brillance sur son identité faite de pseudos qui peu ou prou restent quelquefois contrariés avec intelligence.
Certes le pseudo — tant s’en faut — n’est pas une la lâcheté. Car celui-là devient un personnage qui l’attire par les pieds, voire la pousse à croire ce qu’elle ne croit pas. Mais ses limbes ont été sauvées in extremis à la naissance de cet artifice.
Celui-ci est le pire ou le meilleur de sa personnalité. Et elle s’en délecte. Car si rien n’a lieu qu’un pseudo. Il peut selon divers masques devenir l’étiquette de littératures, de vies imaginaires, de récits fantastiques ou autobiographiques, etc. C’est donc une manière de le et se dire dans quelques fantômes ou plein de gens pour celle qui s’estime timide.
Ce livre devient inspirant et nourrissant là où le pseudo s’affirme d’un moment à un autre et lui donne à réfléchir, à réagir, à comprendre les mondes qui travaillent la langue. Ici, sans effet d’ordre, sans exhaustivité se crée une forme d’altérité maquillée de douleur ou de rire.
Néanmoins, et loin de la blague de Lichtenberg et son fameux couteau dont il manque le manche et la lame, rien ici
ne doit pas faire abstraction tant Ella Balaert donne à l’âme. Plurielle qu’importe puisque le multiple est histoire, comme elle l’écrit, de “s’éclater” — comme Molière lui même le fit. Preuve que le pseudo est une maladie imaginaire que l’écriture guérit.
jean-paul gavad-perret
Ella Balaert, De plume et d’ailes, éditions des femmes — Antoinette Fouque, Paris, avril 2024, 204 p. — 16,00 €.