Dans ce livre, l’auteur relate des faits authentiques, la véritable histoire des deux premiers tueurs en série de Grèce. Le livre débute avec l’histoire de la Winchester 30–30, cette carabine plébiscitée par les chasseurs et… les tueurs.
Le récit commence à Thèbes, le 6 mars 1969, au milieu de la nuit. À la station-service “Mobil”, trois Grecs vont se retrouver face à deux hommes venus voler la caisse. L’un d’eux va se muer en tueur de sang-froid… pour ne pas laisser de traces. C’est le point de départ d’un parcours sanglant de quarante jours pour deux Allemands, Hermann Duft et Hans Bassenauer. Ils se rendent coupables de cinq braquages, tuent six fois et font un blessé grave.
Outre les routes suivies par ce duo sanglant, le récit fait une large place aux victimes, au contexte dans lequel elles évoluent et aux enquêteurs qui vont mener la traque. Yannis Ragos dresse des portraits saisissants des victimes, de leurs proches, des assassins. Il donne une description précise, presque chirurgicale de la succession des événements et des personnages impliqués d’une façon ou d’une autre.
C’est aussi un éclairage sur la Grèce de cette époque, sur le régime politique du pays alors sous la coupe de la dictature des Colonels. Les autorités policières étaient plus mobilisées pour réprimer les activités des dissidents que pour traquer des criminels. De plus, ce régime refusa longtemps de rendre les faits publics pour ne pas prêter le flanc à des critiques sur la politique d’ordre public dans il s’était fait le chantre.
L’intérêt de ce récit, outre le plan criminologique, se situe sur les nombreuses connotations psychanalytiques, sociologiques et politiques.
C’est alors qu’il débute dans le journalisme que Yannis Ragos prend connaissance pour la première fois de cette affaire. Son intérêt est éveillé et il va recueillir le plus d’éléments possible, fréquentant des archives de journaux, des dossiers judiciaires et les libellés des procès. Un premier livre paraît en octobre 2008. C’est pour les cinquante ans de cette tragédie que ce livre est réédité enrichi de nouveaux éléments ayant émergés depuis. C’est cette version que propose l’éditeur H & O.
Un livre au contenu remarquable pour la présentation très efficace de ce parcours sanglant et ses suites judiciaires. Très documenté, il éclaire nombre de dysfonctionnements et relate des faits glaçants.
serge perraud
Yannis Ragos, L’odeur du sang (Myrizei aima), traduit du grec par Isabelle Berrivin-Tloupas, Éditions H & O, coll. “Polar”, juin 2023, 288 p. — 21,00 €.