La machine de Turing (Benoit Solès / Tristan Petitgirard) — Festival d’Avignon 2023

Une piètre édi­fi­ca­tion pathétique

Sur l’écran défilent des images hété­ro­clites en damier : des rouages, des équa­tions, Blanche Neige, des défi­lés, Hit­ler, Chur­chill, les élé­ments sont inter­chan­gés à un rythme assez rapide. Puis, un dis­cours un peu gran­di­lo­quent intro­duit le pro­pos comme un hom­mage au grand savant.
Le nar­ra­teur se met ensuite rapi­de­ment dans la peau d’Alan Turing, celui qui a déchif­fré Enigma, le sys­tème de codage des nazis pen­dant la guerre. On assiste alors à des tranches de vie, qui pré­sentent dans un ordre non chro­no­lo­gique les ren­contres déci­sives du mathé­ma­ti­cien qui a eu l’intuition du lan­gage binaire. Sa convic­tion qu’on peut modé­li­ser la pen­sée afin d’en faire acqué­rir des rudi­ments aux machines, la perte de son ami d’enfance le plus cher, la per­sé­cu­tion de son homo­sexua­lité sont thématisées.

Les scènes sont pré­sen­tées de façon expli­cite ; le pro­pos est inté­res­sant mais s’inscrit dans un registre didac­tique, tout en pré­sen­tant Turing de façon cari­ca­tu­rale, comme un bègue sou­mis à la condam­na­tion de ses “mau­vaises mœurs”. Les dia­logues sont écrits de telle sorte qu’on sai­sit l’intention de l’auteur ; les élé­ments impor­tants sont sur­li­gnés. Le sens s’en trouve saturé, comme si on vou­lait faire par­ler les silences.
Les comé­diens sont géné­reux, mais mono­li­thiques ; leur jeu n’ouvre pas la réflexion, mais iden­ti­fie les points sen­sibles. On s’ennuie donc à voir ce qui ne nous est que trop mon­tré ; il en est comme si on ne sépa­rait pas les didas­ca­lies, cen­sées expli­ci­ter le contexte, et les échanges, qui pour­raient expri­mer des doutes.

Les affres vécues par Alan Turing eussent mérité une écri­ture plus nuan­cée, voire plus acé­rée. Dans cette ver­sion, son his­toire est réduite à une piètre édi­fi­ca­tion pathétique.

chris­tophe giolito 

 

La machine de Turing

de Benoit Solès

mise en scène Tris­tan Petitgirard

Avec Benoit Solès, Jules Dousset

Décors Oli­vier Prost ; lumières Denis Schlepp ; musique Romain Trouillet ; vidéo Mathias Del­fau ; cos­tumes Vir­gi­nie H ; assis­tante à la mise en scène Anne Plan­tey ; enre­gis­tre­ment vio­lon­celle René Benedetti.

À la Scala Prro­vence 3 rue Pour­query de Bois­se­rin 84000 Avi­gnon, Scala 600,

du 7 au 29 juillet à 13h30, durée 1h30 relâches les 10, 17, 24 juillet.

Au théâtre du Palais Royal à par­tir du 18 août.

Pro­duc­tion Ate­lier Théâtre Actuel Copro­duc­tion : Mor­com Prod, ACME, Fiva Pro­duc­tion
Coréa­li­sa­tion : La Scala Provence

Spec­tacle ins­piré par la pièce de Hugh Whi­te­more “Brea­king The Code”. Basée sur “Alan Turing : The Enigma” d’Andrew Hodges.

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