Tiago Rodrigues, Théâtre, 2011–2015

«  En atten­dant Avignon. »

Tiago Rodrigues devient le nou­veau direc­teur du Fes­ti­val en 2023, suc­cé­dant à Oli­vier Py. A cette occa­sion, son édi­teur fran­çais, Les Soli­taires Intem­pes­tifs pro­pose la réunion de ses pièces tra­duites entre 2011 et 2015 dans leur ver­sion fran­çaise de Tho­mas Resendes et de Tho­mas Quillar­det pour la pièce Tris­tesse et joie dans la vie des girafes. Il s’agit d’un volume 1, dans l’attente de la suite d’une édi­tion des textes postérieurs.

Ce volume pro­pose éga­le­ment deux œuvres inédites, de la même période (2012 et 2013) : Trois doigts au– des­sous du genou et Entre les lignes. Ainsi l’auteur pro­li­fique des­sine t-il un long par­cours théâ­tral.
La simple chro­no­lo­gie, qui orga­nise selon les dates de paru­tion, le livre n’est pas l’essentiel de cette entre­prise édi­to­riale. Tout d’abord, d’une pièce à l’autre, Rodrigues campe son écri­ture sur la terre de ses propres réfé­rences dramatiques.

De manière évi­dente, l’ensemble des titres «  antiques » comme réécri­ture : Antoine et Cléo­pâtre dans la veine sha­kes­pea­rienne et les trois tra­gé­dies grecques, Iphi­gé­nie, Aga­mem­non et Electre ainsi que la source roma­nesque avec Bovary, disent qu’écrire du théâtre signi­fie écrire à par­tir d’une « biblio­thèque » uni­ver­selle, idéale pour Rodrigues.
A la fois il cite, emprunte, trans­forme, détourne pour faire siens tous ces textes fon­da­teurs mais va jusqu’à inté­grer aussi, dans ses dis­tri­bu­tions per­son­nelles, des écri­vains comme l’immense Anton Tche­khov (cf. dans la pre­mière pièce, Tris­tesse et joie de la vie des girafes) ou Gus­tave Flau­bert en accusé lors du pro­cès de 1857 intenté contre son célèbre roman (cf. Bovary).

Lorsqu’il s’agit de théâtre, il faut pen­ser certes texte mais sur­tout repré­sen­ta­tion et de ce point de vue là, le volume dévoile à la fois l’histoire des scènes dra­ma­tiques du Por­tu­gal et celle des pla­teaux fran­çais.
D’ailleurs, Rodrigues consacre sa pièce, Trois doigts au-dessus du genou, à la cen­sure inepte du temps de la dic­ta­ture de Sala­zar qui s’attaque aussi bien à des auteurs modernes qu’anciens parmi les plus émi­nents. Le théâtre est poli­tique, évidemment.

La coïn­ci­dence de cette publi­ca­tion avec la prise de fonc­tion de Rodrigues à la tête d’un fes­ti­val inter­na­tio­nal de théâtre tel qu’Avignon n’échappera à per­sonne puisque un cer­tain nombre des pièces «  recueillies » ont une his­toire avi­gnon­naise. Tho­mas Quillar­det en 2017 a créé Tris­tesse et joie … en Avi­gnon. En 2015, Rodrigues y monte son Antoine et Cléopâtre.

Tche­khov hante la lit­té­ra­ture de Rodrigues et, en 2021, il a mis en scène La Ceri­saie dans la Cour d’honneur du Palais des Papes et cet été, en juillet, le public retrou­vera l’une de ses pièces les plus connues, By heart (Apprendre par coeur), dans ce même lieu .
Déci­dé­ment Tiago Rodrigues incarne une vision contem­po­raine d’un monde théâ­tral élargi, lui, le poly­glotte et l’acteur, l’auteur poly­graphe, le met­teur en scène et, à par­tir de cette année, le concep­teur du fes­ti­val in d’Avignon.

marie du crest

 Tiago Rodrigues, Théâtre, 2011–2015 , Les Soli­taires Intem­pes­tifs, 2023, 480 p. — 21,00 €.

 

D’autres textes récents sont parus chez le même éditeur :

Souffle ( Sopro) suivi de sa façon de mou­rir en 2018

Cata­rina et la beauté de tuer des fas­cistes en 2020

Choeur des amants en 2021 et Dans la mesure de l’impossible en 2022.

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