Des langues tournent en nous et nous hantent, insolites, secrètes, apparemment mortes mais bien vivantes. Valère Novarina nous l’a appris : c’est comme un fluide, un sang. En conséquence, à l’heure où les machines empiètent sur notre règne et nos compétences, ne cherchons pas à faire plus qu’elles mais moins.
Il s’agit de descendre, faire le vide qu’elles n’atteindront jamais.
Au lieu de multiplier concepts, logaèdres et logarithmes, recueillons en langues forestières des figures humaines. Ne sachant pas où nous allons, mais y avançant quand même, nous apprendrons à distraire nos frères et soeurs, débarbouiller nos parents, décharger des sacs de son en baie molle, renverser des brouettes, masturber les girafes, écrabouiller de sauts briquets, casser de la vaisselle comme jadis les hâbleurs de fêtes foraines, peaufiner nos agrumes, cuivrer les argent-teints, couper les chevaux en quatre, manucurer les pieds des culs-de-jatte, tendre une perche aux grenouilles de bénitier, rattraper l’amant pendant qu’il est encore chauve, fulminer pendant que dîne Martine à Las Vegas, plier Dieu et mercredi descendre, bon dire, planter le bâton, pratiquer flexion et extenfion afin qu’en nous le sot murisse.
jean-paul gavard-perret
Photo Yassine Tiki