Dans un cimetière, deux femmes regardent descendre un cercueil dans la fosse. Elles ont le ventre plombé car cela aurait pu être elles. Cela aurait dû être elles.
Quelques semaines avant l’enterrement, Esther fait un pot de départ. Elle quitte la police pour un poste chez Thanatea, une multinationale des pompes funèbres en Suisse, au grand dam de Layla sa binôme depuis des années.
Un homme s’est invité, Marc d’Orsay, qui a transformé la vie d’Esther en enfer. C’est un prédateur qui avait flairé son passé douloureux, qui l’a maintenue sous son emprise et qui aujourd’hui la menace de lui faire payer ce qu’elle lui a fait, cher, très cher.
Layla est bouleversé par le départ d’Esther. Avec Hélène elles se sont connues dès l’enfance. Elles ont intégré la police et Layla a suivi Esther quand elle a été mutée, suite à sa promotion, à Lyon. C’est au parc de la Tête-d’Or que Layla promène Nour, sa petite fille adorée quand elle est approchée par d’Orsay qui essaie de la séduire. Elle fuit. Mais Hélène, qui a suivi la scène de loin, est repérée par le prédateur qui ose lui faire des avances.
Esther arrive sur son nouveau lieu de travail, une île sur le lac Léman. Or, elle se retrouve coupée de tout contact, sans téléphone, sans Internet confidentiels.
Et les événements se précipitent quand le cadavre décomposé d’une femme est découvert dans un box loué par Esther… Et celle-ci disparaît…
Ce roman est construit autour de trois magnifiques personnages féminins, des femmes qui se sont connues enfants, dans des conditions difficiles, mais qui ont conservé des liens d’amitiés très forts. Cependant, la romancière ne les ménage pas et n’hésite pas à les bousculer durement. Esther et Layla travaillent ensemble. La première a perdu Nora, sa petite fille, d’une maladie orpheline. Layla a dû se séparer de son compagnon à cause de violences conjugales et Hélène, qui lutte contre un cancer, a un mari accro aux jeux vidéo et au cannabis.
La romancière installe une intrigue forte, dense, dure qui impose une lecture en tension face aux multiples rebondissements et au tempo soutenu. Elle donne nombre de détails sur le travail de la police, sur les cérémonials entourant la mort. Elle installe, autour de ses héroïnes aux caractères construits, aux profils psychologiques subtilement minutieux, une théorie de protagonistes tous intéressants, qu’ils soient sympathiques ou ignobles.
Si elles se connaissent depuis l’enfance, il reste des secrets de la part des unes et des autres, des secrets qui vont nécessiter des interventions hasardeuses et surtout dangereuses.
Avec Thanatea, Sonja Delzongle signe un thriller psychologique et musclé, un récit prenant, addictif pour ses héroïnes si empathiques, pour un art consommé de l’intrigue à rebondissements.
serge perraud
Sonja Delzongle, Thanatea, Fleuve noir, coll. “Policiers & Thrillers”, mars 2023, 416 p. – 20,90 €.