Dès la fin des années 1830 et en suite logique avec l’histoire de la peinture, le nu est l’un des premiers genres de la photographie. Il a peu évolué au fil du temps, et selon trois clés : le noir et blanc est préféré à la couleur plus naturaliste ; le corps féminin est représenté en très très large ; et enfin et en conséquence le corps dans la photographie de nu est presque toujours créé par et pour le regard masculin.
Dès ses premières œuvres, Takano Ryudai continue cette tradition mais avec un reste à charge volontairement ambigu. Photographiée en multiples performances devant la caméra et pendant trois ans, la série est fondée sur un postulat simple : une invitation du photographe à un groupe de danseurs butoh à incarner le karamaru (emmêlement).
L’artiste n’a donné aucune autre indication pour qu’ils trouvent leur propre voie dans cette idée.
L’ensemble pose de nombreuses questions et une nouveauté : le corps nu n’est plus forcément objet de désir. De tels amas peuvent suggérer autant éros que thanatos.
L’impression est donc moins celle d’une fête des sens qu’une angoisse par ce qui devient chaos tant les corps restent anonyme et sans émotion.
jean-paul gavard-perret
Ryudai Takano, ca.ra.ma.ru, Libraryman, 2022, 64 p. — 45,00 €.