Chaque photo dans son instantané découpe chez Bruno Bonnamour des passages des êtres dans la ville tels qu’ils la parcourent au quotidien.
Ils en deviennent l’organe, voire l’architecture et définissent sa ligne d’horizon devenue mouvante à l’image du trouble changeant qui émane des passages.
Le regard constate la dynamique de telles compositions dont le chaos est non scénarisé. Néanmoins, Bonnamour sait inventer une beauté et une poésie urbaine dans ce quotidien où nous sommes condamnées, que nous soyons à Lyon ou au Japon.
Les rêves n’y deviennent pas forcément l’alternative la plus efficace au réel. Derrière l’anecdote parfois amusante et toujours surprenante, se fait le constat soudain de notre inconfort obligé que de telles prises savent inclure.
Le goût du réel est là sans le moindre exotisme. Mais le regard saisit les formes en noir et blanc ou couleurs afin d’accommoder les compositions où le temps est celui des pensées rapides, qu’elles soient légères ou soucieuses. Par le choix et le regard du photographe s’opère une paradoxale décantation mais tout autant une invitation au voyage de même nature.
S’ensuit une série de translations dont le résultat feint la simplicité — mais elle induit une complexité dont Bonnamour maîtrise la spontanéité. Les personnages restent aussi vivants que “transportables” sans souci du décoratif.
Et ce, pour laisser paraître un certain épanouissement de l’urbain en un seul motif : celui du passage et de la traversée .
jean-paul gavard-perret
Bruno Bonnamour, La machine à circuler (texte de Jean-Paul Gavard-Perret), Editions Colorpolis, décembre 2022.