Clément Oury, Le duc de Marlborough. John Churchill, le plus redoutable ennemi de Louis XIV

L’ennemi de Louis XIV

Wins­ton Chur­chill en fai­sait un motif de fierté : il était le des­cen­dant du duc de Marl­bo­rough dont il écri­vit la bio­gra­phie avec sa plume incom­pa­rable, et dont il pen­sait avoir hérité du génie. Sans por­ter de juge­ment sur cette der­nière asser­tion, force est de consta­ter que ce glo­rieux ancêtre fut un homme au des­tin extra­or­di­naire et que retrace Clé­ment Oury avec un talent remar­quable.Ce jeune et pro­met­teur his­to­rien décrit toutes les facettes, même les moins relui­santes de celui qui res­tera comme le vain­queur de Louis XIV.  Sans doute est-ce la rai­son pour laquelle il est si peu connu en France, à part une chan­son­nette célèbre.

John Chur­chill se carac­té­rise tout d’abord par une ascen­sion sociale rapide puisque, issu de la gen­try, il accéda au fir­ma­ment de la hié­rar­chie sociale anglaise. Avec son épouse Sarah, il forma un de ces couples poli­tiques redou­tables où affec­tion, ambi­tion et cal­cul poli­tique se mêlent afin de satis­faire une ambi­tion com­mune.
Marl­bo­rough usa de tous ses talents poli­tiques, la ruse, la séductio,n, la dis­si­mu­la­tion, afin de gra­vir les marches du pou­voir, aban­don­nant la cause de Jacques II auquel il devait tout au pro­fit de Guillaume d’Orange mais sans jamais rompre avec les exi­lés de Saint-Germain-en-Laye. Dis­gra­cié par Guillaume III, il se plaça sous la pro­tec­tion de la prin­cesse Anne, future sou­ve­raine, qui le cou­vrit de titres et de fonc­tions. Ne fai­sons pas pour autant de cet homme de convic­tions (notam­ment pro­tes­tantes) un pur opportuniste.

Clément Oury insiste sur le fait capi­tal que le duc n’était pas seule­ment un cour­ti­san habile mais aussi un remar­quable diplo­mate qui sut avec brio se mou­voir dans le laby­rinthe des négo­cia­tions inter­na­tio­nales autour de la grande ques­tion de son temps : la Suc­ces­sion d’Espagne, finis­sant par deve­nir incon­tour­nable dans les dis­cus­sions et la prise de déci­sion. La coa­li­tion lui dut son unité, jusqu’à ce que les chan­ge­ments poli­tiques en Angle­terre n’imposassent un tour­nant dans la guerre.
Tou­te­fois, c’est le mili­taire qui l’emporte, celui qui infli­gea à la France invain­cue du Roi Soleil une suc­ces­sion de défaites dont la plus reten­tis­sante fut celle de Blein­hein. Marl­bo­rough, ce fut d’abord un chef mili­taire de haute volée qui, avec le prince Eugène, forma un redou­table duo, au détri­ment des armes françaises.

Enfin, à tra­vers ce livre pas­sion­nant, le lec­teur décou­vrira les res­sorts de la vie poli­tique entre la fin du XVIIème siècle et le début du XVIIIème. Poli­tique inté­rieure anglaise mar­quée par les sou­bre­sauts de la Glo­rieuse Révo­lu­tion, de la ques­tion royale, de la suc­ces­sion pro­tes­tante.
Poli­tique inter­na­tio­nale cen­trée autour de l’hégémonie fran­çaise qui, avec l’installation de Phi­lippe V à Madrid, aurait atteint un niveau inac­cep­table pour les autres Etats. Equi­libre des pou­voirs, équi­libre international.

Albion s’érigeait en modèle et en puis­sance. Et Marl­bo­rough apporta sa pierre à l’édifice.
Bref, ce très beau livre est une réussite.

fre­de­ric le moal

Clé­ment Oury, Le duc de Marl­bo­rough. John Chur­chill, le plus redou­table ennemi de Louis XIV, Per­rin, mai 2022, 512 p. — 24,00 €.

 

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