Avec Marion, au cœur de drames familiaux
Avec Danielle Thiéry, le lecteur entre de plain-pied dans le quotidien de policiers, le quotidien sordide, traumatisant. Il côtoie, avec l’équipe de l’Office, une lie de l’humanité.
Vador, un dangereux pédophile, est terrorisé quand il apprend qu’il va bientôt sortir du centre pénitentiaire de Caen. Il se suicidera après la visite d’un prêtre.
La commissaire Marion assiste, à la mairie du 14e arrondissement de Paris au mariage de Valentine Cara et de Rose. Au fond de la salle, une femme tousse fréquemment. C’est la mère de Valentine, mais elle ne veut pas la rencontrer, elle veut voir Marion pour lui faire part de ses doutes quant au suicide de Vador. Elle fuit avant que sa fille puisse l’approcher.
Dans la Souricière, Hadès soumet un prisonnier, qu’il appelle Secrétaire général, à la torture, le forçant à regarder une scène enregistrée de pédophilie.
La classe politique est en émoi. Fabien Larcy, le Secrétaire général du Parti de la gauche révolutionnaire a disparu depuis quatre jours. Parce qu’il a été mêlé à une affaire trouble, que des images compromettantes ont été retrouvées sur un ordinateur lors d’une perquisition au siège du parti, le parquet veut une co-saisie du dossier entre la Brigade criminelle et l’Office.
Valentine recherche sa mère pour tenter de se réconcilier. Celle-ci fait contacter Marion depuis un luxueux établissement de santé, ce qui étonne compte-tenu de son train de vie modeste.
Pourquoi veut-elle cette enquête sur la mort de Vador ? Les recherches pour retrouver Larcy amènent, tant Valentine que Marion, à être prises dans un piège qui semble impossible de déjouer et qui va les mettre en danger…
Avec La Souricière, l’intrigue s’appuie sur la pédophilie. Mais le propos s’intègre dans un cadre plus large, s’intéressant aux sources de cette infamie. Avec des personnages nouveaux, l’auteure examine les traumatismes qui peuvent conduire à une telle déviance et les raisons annexes qui la favorisent. Chaque protagoniste est détaillé, son caractère étoffé, ses motivations comme ses traumatismes, les liens bénéfiques comme funestes qu’il a pu tisser, tenter de nouer, sont étudiés. L’auteure met en scène des modèles psychologiques dont on commence à connaître les malheureuses conséquences.
Quoi qu’il en soit, Danielle Thièry bouscule sa galerie de personnages récurrents, montre l’importance du vécu de l’enfance dans la construction de l’adulte et mène des enquêtes qui débouchent sur des dénouements remarquables.
Dans ce roman, un personnage politique occupe une place de choix et on ne peut s’empêcher, sur certains points, de faire des rapprochements avec un individu qui occupe la scène médiatique en faisant son show.
La romancière se sert de l’actualité pour introduire des détails, pour expliciter des situations, évoque les ratés procéduraux, les black-out judiciaires qui contribuent à l’enlisement de dossiers…
Elle use d’images fortes pour expliciter attitudes et situations. Toutefois, on peut avoir quelques doutes quant à celle relative à l’attitude glaciale d’une dame : “…l’air d’une vierge outragée par une armée de soudards.”
Un roman passionnant, addictif, particulièrement riche en informations et données de toutes natures, où des intrigues, tant principale que secondaires, sont construites avec un redoutable art du récit.
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serge perraud
Danielle Thiéry, La Souricière, Flammarion, Label “Versilio”, juin 2022, 416 p. – 21,00 €.