John Landis, Hamburger Film Sandwich

Voyage au bout de la parodie

L’esprit Canal + « CSP plus » va en prendre un sacré coup avec  Ham­bur­ger Film Sand­wich  (1977). Des « Nuls » (ver­sion télé ou films) aux for­mats sati­riques de la chaîne, tout était déjà dans ce film zap­ping hors de ses gonds. Alain Cha­bat a d’ailleurs reconnu sa dette au film. Il a repris dans sa Cité de la Peur  le « Carioca » qui ouvre l’œuvre de Lan­dis. Ce der­nier a trouvé ici des com­plices de génie : les « ZAZ » (de et entre autres Y a-t-il un pilote dans l’avion ? ). Le réa­li­sa­teur et ses comé­diens bate­leurs s’en donnent à corps joie.
Le film devient sous leurs assauts la grande comé­die de la comé­die. Il est construit selon une suite de pas­tiches et de charges. Le sérieux est gan­grené de manière presque impen­sable au regard des règles de la cen­sure du cinéma amé­ri­cain de l’époque. Sont pré­sen­tés des pro­grammes d’éducation sexuelle très par­ti­cu­liers. Ils n’ont rien à envier à ceux de Jules Edouard Mous­tic dans son « Gro­land ». Idem pour la bande annonce d’un film impro­bable « Lycéennes catho­liques en cha­leur »… Sans oublier le mor­ceau de résis­tance de l’œuvre : un film kung-fu com­plè­te­ment déjanté avec le sosie de Bruce Lee lui-même.

La morale est relé­guée aux oubliettes. Et Lan­dis éta­blis­sait déjà au sein même de la cathé­drale hol­ly­woo­dienne les nou­velles règles de ce qu’on osait à peine ima­gi­ner. Ce qui échut d’un tel état de faits et d’un tel spec­tacle revint pour cer­tains pisse-froid jusqu’à perdre l’estime qu’ils accor­daient au Sep­tième art tant le réa­li­sa­teur se per­met des incon­sé­quences sul­fu­reuses sur le mode le plus ludique qui soit.
Quoique daté, le film garde tout son inté­rêt et sa vis comica. Lan­dis ren­voie les for­mats offi­ciels au rang de cloaques gran­di­lo­quents et affli­geants. Les écrans grands ou petits qui sont deve­nus notre ter­ri­toire du réel sont retour­nés. Non seule­ment Ham­bur­ger Film Sand­wich dépote tous les bons sen­ti­ments sur son pas­sage mais il réus­sit l’impossible : ne jamais tom­ber dans le vul­gaire – ce qui est dans une telle entre­prise un exploit. Et si on a taxé par­fois ce film de por­no­gra­phique, il s’agit d’un por­no­gra­phique mental.

Hambur­ger Film Sand­wich est donc par essence une œuvre dévoyée et voyou. Sa com­mo­tion “ céré­brale ” en mêlant le sacri­lège au sacré tient de la per­for­mance et du pro­fes­sion­na­lisme. Les sté­réo­types et l’émotion spé­cu­laires sont tor­dus par le rire. Son typhus n’épargne per­sonne. Pas même ceux qui pro­curent la dose de nar­co­tique télé­vi­suel. Dans une scène culte du film, ils deviennent eux-mêmes voyeurs des voyeurs et grimpent aux rideaux par effet retour d’une feinte de réa­lité. Le spec­tacle est donc régres­sif et jouis­sif à sou­hait. Il per­met de pas­ser le mur de l’impossible en ce voyage au bout de la parodie.

jean-paul gavard-perret

John Lan­dis, Ham­bur­ger Film Sand­wich,
DVD Car­lotta Film, Paris, juin 2013 — 16,99 €

Réa­li­sa­tion : John LANDIS
Scé­na­rio : Jerry ZUCKER, James ABRAHAMS, David ZUCKER
Avec : Mari­lyn JOI, Saul KAHAN, David ZUCKER, Jim ABRAHAMS, Jerry ZUCKER, Donald SUTHERLAND, John LANDIS, Bill BIXBY
Direc­teur de la pho­to­gra­phie : Ste­phen M. KATZ
Mon­tage : Georges FOLSEY Jr.
Pro­duc­teurs : Robert K. WEISS

NOUVEAU MASTER RESTAURÉ
Ver­sion Ori­gi­nale / Ver­sion Fran­çaise
Sous-Titres Fran­çais
For­mat 1.85 res­pecté – 16/9 com­pa­tible 4/3 – Cou­leurs
Durée du Film : 80 mn
SUPPLÉMENTS

. INTRODUCTION DE JOHN LANDIS (2 mn)

. COMMENTAIRES AUDIO DE JOHN LANDIS, DES ZAZ ET DE ROBERT K. WEISS (VOST)

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