Les chaises (Eugène Ionesco / Stéphanie Tesson)

Les chaises pliées à la comédie  

Sur une île, deux per­sonnes sont dans une situa­tion de soli­tude : un vieux couple essaie de conju­rer la détresse du monde et sans doute la sienne propre, au moyen d’expédients plus ou moins cocasses. Posi­tions redon­dantes, pan­to­mimes répé­tées, inquié­tudes vaines, espoirs insanes, les répliques un peu fou­traques finissent par s’ordonner autour d’un pro­jet ambi­tieux : rien moins que déli­vrer un mes­sage à l’humanité.
Mais l’absurde trans­pa­raît peu à peu, à tra­vers des répliques inter­po­lées, des posi­tions inte­nables. Les for­mu­la­tions les plus banales sont entre­cou­pées de décla­ra­tions méta­phy­siques. La repré­sen­ta­tion se pré­sente comme un gigan­tesque bal­let, qui consiste en l’accueil d’invités en nombre appa­rem­ment sans cesse croissant.

Ionesco met en exergue la contra­dic­tion entre la pré­ten­tion scien­ti­fique et la ser­vi­lité poli­tique. Comme dans d’autres pièces de l’attente, tout repose sur l’intervention d’un per­son­nage dont la venue ne cesse d’être dif­fé­rée. Ionesco construit une cathé­drale fra­gile sur du vide. On peut y voir une méta­phore des (dés)illusions qui consti­tuent cha­cune de nos vies, de la vacuité du mes­sage de l’humanité, de la futile inten­sité de nos ambi­tions, des délires qui accom­pagnent notre décré­pi­tude.
Sté­pha­nie Tes­son tente de don­ner vie à la situa­tion, tout en en fai­sant res­sor­tir l’incongruité, par un concert de son­nettes, par dif­fé­rents brui­tages, par l’incarnation de l’orateur. Mais, en dépit des efforts des comé­diens, le spec­tacle ne convainc pas, car le choix de jouer de façon far­cesque et de mon­trer l’absence contre­vient à la dimen­sion exis­ten­tielle et méta­phy­sique du propos.

chris­tophe gio­lito

Les chaises

d’Eugène Ionesco

Mise en scène Sté­pha­nie Tesson

© Juliette Renard/Clémence Cardot

Avec Cathe­rine Sal­viat, Jean-Paul Farré, Ale­jan­dro Guer­rero ou Jade Breidi.

Assis­tante mise en scène Émi­lie Che­vrillon ; lumières Fran­çois Loi­seau ; cos­tumes Corinne Rossi ; pein­ture sur cos­tumes Mar­gue­rite Dan­guy des Deserts.

Pro­duc­tion Théâtre de Poche-Montparnasse ; pho­to­gra­phies Clé­mence Cardot.

Au théâtre de Poche-Montparnasse, 75, bou­le­vard du Mont­par­nasse 75006 Paris.

http://www.theatredepoche-montparnasse.com/project/les-chaises/ 01 45 44 50 21

À par­tir du 10 février — Du mardi au samedi 21h, dimanche 15h, relâche le 19 mars.

 

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