Humour et amour au poil et sur d’autres lieux
Rabus ne désarme pas. Au contraire. La vieillesse le rend vert et presque galant plus que glaçant. Certes, les romantiques doivent s’éloigner de sa forêt des songes et de sa baraque en planche.
De même que celles (à 80 %) et ceux (à 70 %) qui selon une enquête France-Culture et Arte en novembre estiment que les relations peuvent se passer de sexe.
De fait, cela fait un grand nombre d’exclus de la galerie Suzanne Tarasiève. Il restera néanmoins suffisamment d’afficionados pour apprécier les farces de l’iconoclaste — même lorsqu’il joue l’ermite. Perruche, perroquet, chat, lombric et toute une animalerie s’animent dans des paysages souvent de neige.
A n’en pas douter, souvent Rabus se réveille la nuit : une idée jaillit et il faut dès le lendemain l’instruire en transformant les formes les plus basses comme les plus élevées selon divers montrages qui mêlent des reprises de la tradition avec des visées contemporaines.
Etres, animaux, objets : tout y passe et se trouve convoqué pour divers usages intempestifs. Et si tous les goûts ne sont pas dans la nature, l’artiste propose une métamorphose du métamorose en des visions hors de leurs gonds.
Une nouvelle fois, il ravit par la qualité mystérieuse et drôles de ses images. Rabus reste à ce titre tout sauf un cuistre mais pas seulement un clown.
Surréaliste conséquent, il démontre qu’en son « ergo sum », le « cogito » fort peu cartésien offre un monde aussi farouche qu’accueillant. Il suffit donc d’entrer à pas feutrés dans ses poulaillers visuels pour que le monde sorte de la tristesse.
Ce qui débouchait sur la douleur de la vieillesse glisse sur la pente de plaisir ou de la farce, là où tout ce qui reste (souvent bien peu) donne envie d’être plus que jamais en vie.
jean-paul gavard-perret
Leopold Rabus, La lumière ne brûle pas dans un vieux poteau, galerie Suzanne Tarasiève, 7, rue Pastourelle F-75003 Paris + LOFT19 Passage de l’Atlas / 5, Villa Marcel Lods F-75019 Paris, du 11 décembre 2021 au 5 février 2022.