En mélangeant trois sujets — la première personne (la narratrice), la deuxième (quand une voix, souvent maternelle, lui parle), la troisième (quand elle s’observe) -, ce roman de la langue est aussi celui d’une construction et d’une initiation pour passer à un état supérieur et une montée en puissance.
Mais les conflits demeurent car Toni affronte ce moment où “l’adolescence est une salope, l’autorité est une chienne”. La narratrice garde encore une fantaisie et accepte celles et ceux qui voudraient faire d’elle une petite fille modèle.
Elle se heurte toutefois à bien des principes de réalité. Sa mère a beau dire “J’ai attendu alors tu attends. Tu fais comme moi”, les temps ont changé et elle ne se laisse pas faire. Le moment des refus est arrivé.
Souvent d’une manière inopérante et stérile et des fuites finissent par une chute où Toni se casse un bras.
Souvent d’une manière inopérante et stérile et des fuites finissent par une chute où Toni se casse un bras.
Si bien qu’elle s’inflige “la douleur comme un moyen d’exister” jusqu’à vomir sa gêne. Certes, le corps reste ici central — et pour cause -, cependant tout passe forcément par une mentalisation nécessaire à une prise de conscience.
Atteindre l’autonomie nécessite un apprentissage dont le roman devient le témoin là où la vie des autres (“tous les garçons et les filles” que chante Françoise Hardy — mais pas seulement) heurte celle de l’héroïne.
Elle voudrait bien fêter ses vingt ans. Mais l’angoisse l’étreint “entre le cœur et la gorge”.
A mesure que le temps avance, rien n’est simple voire tout se complique.
A mesure que le temps avance, rien n’est simple voire tout se complique.
Tout est bien vu en ce premier roman qui frappe juste.
jean-paul gavard-perret
Shane Haddad, Toni tout court, P.O.L, Paris, janvier 2021, 158 p. — 17,00 €.