Un polar à la pointe des enjeux de sécurité internationale !
Une femme, qui se fait appeler Ibtissam, assiste à la démonstration de La Solution, au cœur d’un laboratoire libyen.
Au centre radioélectrique des Alluets-le-Roi, dans ce temple de la technologie d’interception, le sous-lieutenant Georges Kabla, stagiaire de Polytechnique, doit paramétrer un logiciel de reconnaissance faciale si perfectionné que personne n’a su l’utiliser. Pendant des jours, prenant sur son sommeil, il alimente l’IA, surnommée Face Mort, de toutes sortes de données.
À 19 heures 32, heure de Paris, un djihadiste poste la vidéo d’une décapitation, exécutée en Libye par un petit voyou de Montauban passé à daech.
À 19 heures 35, une alerte surprend Georges. Face Mort a reconstitué, à partir de la vidéo, un tatouage particulier de l’un des spectateurs de l’exécution. L’homme n’est pas un inconnu. Il est fiché dans le dossier Sauterelle.
Cette identification sonne le branle-bas de combat. Arrivent le directeur de la DGSE en, personne, avec son conseiller spécial. Ils veulent comprendre pourquoi Face Mort a retrouvé cet individu en Libye, fiché dans un dossier assorti d’un très haut niveau de secret.
Sur le terrain nord-africain, la capitaine Maxime Barelli, et son petit commando, traque les djihadistes français pour les neutraliser. Elle possède une liste de cinquante noms. Elle est chargée de cette mission, qui n’existe pas, en punition. Alors qu’elle vient de rayer un nom, elle doit, immédiatement, se rendre en Libye pour protéger une cible.
Et une lutte implacable commence entre le commando, Face Mort et ses servants, la DGSE, les affidés de daech partis en Libye après avoir été chassés d’Irak et de Syrie, plus quelques autres qui s’invitent pour le massacre…
Ce n’est sans doute pas par hasard que le romancier a retenu le Libye comme cadre d’une large partie de son intrigue. Certes, sous le joug de Kadhafi, la situation n’était pas brillante pour les libertés et les droits humains, mais depuis sa mort, elle s’est dégradée de façon inimaginable.
Le pays est la proie de différentes factions, de la rapacité de la Turquie, des tueurs de daech qui en ont fait une zone de repli et qui rêvent d’y implanter un nouveau califat. Des milices, des seigneurs de la guerre, des passeurs de migrants, des trafiquants de chair humaine font la loi sur des populations désarmées.
Avec les portraits très fouillés, précis, étoffés, si proche de la réalité de la galerie des personnages, Stéphane Marchand donne une vision cataclysmique et une intrigue en tension. Outre la description des protagonistes, il détaille les lieux de combats, le fonctionnement des services de renseignements, des représentants de l’Etat, de toutes les parties en présence de façon attractive et avec maestria.
Les actions, et elles sont nombreuses, s’enchaînent avec rapidité. L’inventivité dont fait preuve le romancier, le réalisme des péripéties maintient un intérêt qui va croissant jusqu’à un final éblouissant.
Il décrit l’usage d’un très haut niveau de technologie tant par les services de renseignements, tels que drones, satellites, télécommunications, intelligence artificielle, que par des terroristes qui mettent au point une arme terrifiante, à la mise en œuvre presque imparable.
Stéphane Marchand expose les points de vue de tous les acteurs, qu’ils soient politiques, militaires, agents du renseignement, agents de terrain, techniciens en charge de moyens d’investigations colossaux, tueurs, terroristes qui veulent détruire l’Europe en commençant par la France.
L’intrigue se veut une fiction étayée et crédible. Mais, on ne peut éviter de faire un rapprochement avec les suites d’un conflit généré par deux nabots, conflit dont les motivations restent, aujourd’hui encore, bien floues, mais dont les retombées sont terribles pour des populations entières.
Face Mort interpelle pour la réalité de son propos, les moyens décrits, la course contre la montre engagée pour contrer une terrible menace et une galerie de protagonistes particulièrement réussie.
serge perraud
Stéphane Marchand, Face Mort, fleuve noir, coll. “Policier & thriller”, octobre 2020, 464 p. – 19,90 €.